mercredi 15 juillet 2015

Souvenirs de lecture 17 : Arnaud Le Guilcher



Souvenirs de lecture 17 :Arnaud Le Guilcher


   Nous avons tous de ces lectures qui nous ont profondément touchés, qui sont comme des madeleines de Proust : on se souvient d'où on était quand on les lisait, quel temps il faisait. Il m'a semblé intéressant de savoir quelles lectures avaient marqué les auteurs que nous lisons  et en quoi elles avaient influencé  leur désir d'écrire. Aujourd'hui, c'est Arnaud Le Guilcher qui me fait l'honneur de répondre à mes questions. Je le remercie pour son temps précieux, sa gentillesse, sa disponibilité et son humour.


LLH : Quel livre lu dans votre adolescence vous a le plus marqué et pourquoi ?


ALG : Quand j'étais gamin, j'étais assez isolé. Je vivais avec mes parents dans un petit village. C'était avant les jeux vidéo, internet, l'Iphone et les 187 chaînes à la télévision. J'avais BEAUCOUP de temps libre. (Mais alors beaucoup). Du coup, j'ai BEAUCOUP lu (mais alors beaucoup). J'ai commencé par dévorer Zola, Maupassant, Baudelaire, Rimbaud, Flaubert, Camus... et puis un peu les contemporains : Kundera, Nabokov (surtout Lolita... Ça marche bien avec l'adolescence Lolita)... J'avais un rapport assez physique au livre, quand j'étais vraiment pris par une histoire et que je n'en pouvais plus, je jetais le bouquin. Comme pour m'en débarrasser. Comme pour le fuir. Parce que c'était trop. Que j'était trop fatigué et que le lendemain fallait aller à l'école. Que ça me faisait trop peur et que la nuit était trop silencieuse. Dans ce cas là, le livre partait en vol plané. Répondre à la question sur le livre qui m'a "le plus marqué, adolescent" reviendrait donc à répondre à la question  sur "le livre que j'ai jeté le plus loin".

            Médaille de bronze : "Le chien des Baskerville" d'Arthur Conan Doyle. J'ai un peu la trouille des chiens et là, j'ai été gâté. Balancé à la 50ème page et jamais rouvert.

            Médaille d'argent : "La bête humaine" de Zola. La folie qui traverse ce livre m'a laissé  un souvenir bien vif... Brrrrr...

             Médaille d'or : "Shining" de Stephen King. Je suis content de voir qu'il est progressivement réhabilité comme le grand auteur qu'il est. Toutes ces années à voir les trouducs se pincer le nez en parlant de lui, alors que son oeuvre est riche jusqu'au délire... C'était bien pénible. Stephen King donc, celui de "La peau sur les os", de "Shilling", de "Marche ou crève"... Je suis moins dingue de la partie "Ça" ou "Tommyknockers" mais ça n'est que mon avis.


LLH : En quoi ce livre a-t-il eu une influence sur votre désir d'écrire ?

ALG : Ça a participé à me donner envie d'essayer d'écrire des textes qui captivent les gens. Les fameux "page turners". Lui c'était le suspens, moi c'est plus l'humour, ou du moins une forme de fantaisie. King, c'est du divertissement assumé mais tout est très bien fichu. Il ne prend pas les gens pour des cons. Les affres de l'enfance, de l'adolescence, les bleds perdus, les histoires d'amour contrarié, les monologues intérieurs ... C'est un acte politique de consacrer sa vie à peindre ces laissés pour compte et les décors sans charme de leurs vies. Et puis ses récits... La montée en gamme au fil des pages. L'inexorable en marche : c'est quand même un magistral conteur, cet homme là.

            Le vrai déclic, pour me mettre moi-même à tartouiller, a été la combinaison de plusieurs lectures. Bien plus tard. Je devais avoir 25 ans.

            "Voyage au bout de la nuit" de L F Céline. Une vision. Une prosodie unique et le langage parlé et populaire, qui entre dans la littérature par une porte immense. Une bible. "L'infini  mis à la portée des caniches". Ça m'a totalement retourné. Bardamu; Quel personnage !

             Les bouquins de Jean-Paul Dubois. "Tous les matins, je me lève", "Je pense à autre chose", Les poissons me regardent"... J'ai adoré le regard doux-amer, désabusé, cynique et tendre.

             Les bouquins de Richard Brautigan (surtout "Un privé à Babylone") pour la totale liberté de ton et le feu d'artifice permanent. Le refus d'accepter les règles du jeu et la mise en danger.

              Les bouquins de Djian et Bukowski pour les vapeurs d'alcool et pour la nuit.


LLH : Quelles sont vos dernières lectures coups de coeur ?

ALG : Polichinelle de Pierric Bailly. Un OVNI. J'ai refermé le livre avec le sentiment d'avoir traversé un pays dont je ne connais pas la langue. Formidablement inventif, ludique. Foutraque et bien bien sombre aussi .

           Le jardin du bossu de Franz Bartelt. Complètement débridé, drôle, improbable, lunaire et libre. Grand monsieur ce  Bartelt. Grand styliste. Grande plume.

           Le jour des corneilles de JF Beauchemin. Un récit d'enfance carbonisé dans une nov-langue à la Polichinelle. Ça a pas mal influencé le décorum de Ric-Rac. J'ai été marqué très durablement par ce livre. Je l'ai lu il y a un ou deux ans, et des fois des parfums de ce texte me reviennent. Ça fait partie de mes livres préférés.

           Survivant de Chuck Palahniuk. Un récit explosé, dément, aux mille rebonds. Palahniuk est un styliste impressionnant. Les histoires sont parfois inégales mais son phrasé est inégalable.


Biographie


           Je m'appelle Arnaud Le Guilcher. Je suis né en 1974, ce qui fait que j'ai appris à lire et à écrire en sous-pull orange et que j'ai passé mon bac en écoutant les Smiths et Nirvana. J'ai publié 4 bouquins. "En moins bien", "Pas mieux", "Pile entre deux" et "Ric-Rac". Le premier en 2009 et le dernier cette année. Le 5ème est en train de germer. Il ne pousse déjà pas bien droit.


         


Encore un grand merci à Arnaud Le Guilcher pour sa gentillesse, sa disponibilité et son humour. A ce jour seul Ric-Rac a été chroniqué sur ce blog et vous trouverez la chronique en cliquant ici.

Rendez-vous sur la page Facebook d'Arnaud Le Guilcher https://www.facebook.com/pages/Arnaud-Le-Guilcher/101982883282?fref=ts




jeudi 9 juillet 2015

Interview Olivier Norek St Maur en poche 2015 avec Amis-Lecteurs



Interview d'Olivier Norek St Maur en poche 2015 avec Amis-Lecteurs



Il y a quelques temps je vous parlais de Code 93, un polar authentique. Olivier Norek a accepté, lors du salon St Maur en Poche, de répondre aux questions d'Amis-Lecteurs et des Lectures de hibou. Lors de cette interview, Olivier Norek se dévoile
























Qui est-il?

Olivier Norek est lieutenant de police à la section Enquête et Recherche de la Sous-Direction de la Police Judiciaire (SDPJ) en Seine Saint-Denis (93).
Après deux ans dans l'humanitaire, il devient gardien de la paix à Aubervilliers, puis rejoint la PJ au service financier puis au groupe de nuit chargé des braquages, homicides et agressions.
Après avoir réussi le concours de lieutenant, il choisit Bobigny au sein du SDPJ 93, à la section enquêtes et recherches (agressions sexuelles, enlèvement avec demande de rançon, cambriolage impliquant un coffre-fort…).
Il écrit quelques textes et participe en 2011 à un concours de nouvelles. Il décide de se mettre en disponibilité pour écrire son premier roman "Code 93", un polar réaliste qui nous plonge dans le quotidien des policiers en Seine-Saint-Denis.
"Territoires", présenté en exclusivité à l’occasion de ce 6ème Festival International des Littératures Policières de Toulouse Polars du Sud, est la suite de "Code 93". 
Il a travaillé à l’écriture de la sixième saison d’Engrenages
Les droits de ses romans sont déjà acquis en vue d’être portés à la télévision pour y être déclinés en série.

 L'interview a commencé par un court entretien vidéo pour lequel je vous demande toute votre indulgence. C'est une première et il faut un peu tendre l'oreille au début.





1) Si tu devais te décrire en 3 mots, quels seraient-ils?

Vulnérable, Généreux, Empathique... que des soucis en fait ! 


2) Comment en es-tu arrivé à l'écriture? Quel a été le déclic pour passer de la vie de lieutenant à celui d'écrivain?

J'ai participé à un concours de nouvelles, totalement par hasard, sans rien en attendre... et un alignement d'étoiles ou un miracle m'a fait gagner. Lors de la remise du prix, j'ai rencontré une sorcière qui m'a dit cette phrase à l'origine de tout : ça vous dirait d'écrire un polar ? Et me voilà, quatre ans plus tard, sur mon troisième livre avec des projets télé et ciné... quand je vous parlais de miracle !!!


3) Quelles sont tes influences littéraires?

Irving, Dantec, Favan, Vargas... pas spécialement du polar. Ce que j'aime ce sont les personnages, plus que les histoires ! Mais tout est influence : les séries, les films, la vie autour... et même les rencontres avec les lecteurs dont les noms et prénoms jalonnent mes romans !


4) Dans chacun de tes romans, quelle est la limite entre la réalité et la fiction?

Aucune. l'un et l'autre se chevauchent constamment... je ne me refuse rien, même si ça peut vexer ou faire mal, tant qu'il s'agit de la vérité ! Et pourquoi fouiller dans l'imaginaire quand le monde nous fournit tout ce dont on a besoin ???


5) Y a-t-il beaucoup de points communs entre Coste et Olivier?

C'est mon premier personnage et comme tout premier personnage, il ressemble beaucoup à son auteur. Il a la même vison que moi du travail. le même moteur nous anime, la victime en premier. Quitte à déraper. Il mesure 180cm presque comme moi, il a les cheveux gris et les yeux bleus, comme son papa... et il n'a aucune confiance dans les histoires d'amour !


6) Quelle a été la réaction de ta hiérarchie à la publication de code 93? As-tu subi des pressions de la part de celle-ci?

Aucune pression. Le contraire aurait été difficile quand on ne raconte que la vérité. Quand la vérité gêne, on préfère se taire. Si on l'attaque, elle n'en ressort que plus bruyante... et dans Territoires comme dans Code 93, tout ce que vous lirez est vrai (à 95%) !


7) Quel lecteur est Olivier Norek?

C'est un lecteur au calme. Ou dans les transports en commun. C'est un lecteur de vacances. Un piètre lecteur si vous voulez mon avis qui a pris du retard sur tous les livres de ses amis : Nicolas Lebel, Barbara Abel, Claire Favan, Jacques Saussey, Laurent Scalese, Sophie Loubière, Camut et Hug... ça y est, je m'en veux de ne pas lire assez. Merci !


8) Quel a été ton dernier coup de gueule concernant le monde de la littérature?

Eric Rheinardt... mais je ne peux rien en dire... mais ça fait du bien de l'écrire... vous n'avez qu'à le Google. :(


9) Si pour une seule journée tu pouvais être invisible, que ferais-tu?

La zone 51 en long et en large sans hésiter !!!! Histoire de vérifier !



10) Si tu devais partir sur une île déserte, quel est le seul et unique bouquin que tu prendrais avec toi et pourquoi?

Impossible de répondre. L’œuvre à lire et à relire n'existe pas pour moi. Alors disons le recueil de poésie de Pompidou pour les multiples angles de lecture qu'il propose. Ouais, je sais ça fait intello, mais j'ai tellement peu l'occasion de passer pour un intello !!!

Encore un grand merci à Olivier Norek, pour son temps, sa gentillesse et son humour. Une très belle rencontre.

lundi 6 juillet 2015

Le bruit de la douche de David Desgouilles : un roman, un auteur, des questions.



Le bruit de la douche de David Desgouilles : un roman, un auteur, des questions


    Hier je vous parlais du roman Le bruit de la douche. Aujourd'hui son auteur, David Desgouilles a accepté de répondre à quelques questions. Un grand merci à lui pour son temps et sa gentillesse.


LLH : Pouvez-vous vous présenter en quelques phrases, nous résumer votre parcours ?


DD    : Au niveau professionnel, je suis attaché d'administration dans l'Education nationale. J'ai fait de la politique, très longtemps, dans la mouvance gaulliste et souverainiste, derrière Philippe Séguin et Jean-Pierre Chevènement, notamment. En 2006, j'ai ouvert un blog qui a été repéré par Marianne et Causeur. J'ai été blogueur associé du premier pendant trois ans et je suis chroniqueur  chez le second depuis six ans. C'est grâce à Causeur que j'ai rencontré des gens qui m'ont convaincu que je pouvais passer à une étape supérieure.




LLH : Comment vous est venue l'idée de départ de ce roman ?

DD    : Je souhaitais écrire un roman de politique-fiction. Au départ, je réfléchissait à une idée tournée vers 2017 mais j'avais la crainte que ma fiction soit sans cesse rattrapée par la réalité. C'est alors que dans une discussion avec des collègues de travail, l'un deux a lancé l'idée : "et si tu faisais une fiction en arrière ? Par exemple, pas d'affaire du Sofitel ! " Et la lumière a jailli.


LLH : Votre vision de la politique semble assez désenchantée ce qui, au vu des taux d'abstention aux élections semble être un sentiment assez partagé. Une pratique de la politique dans laquelle l'ego serait mis de côté vous semble-t-elle possible aujourd'hui ?

DD   : Aujourd'hui, c'est le mot. En ce jour de vote en Grèce, Alexis Tsipras démontre qu'on peut faire de la Politique, la vraie. Ce ne sont pas tant les égos qui me gênent. Mon héroïne ne se prend quand même pas pour le quart d'une boîte d'allumettes, et c'est évidemment volontaire. C'est davantage la certitude que la politique française est devenue un théâtre d'ombres, où de mauvais acteurs font semblant, à grand renfort de com'. Alors oui il y a sans doute une Myotte quelque part qui renversera la table. De toute façon, si on veut sauver la Démocratie, il n'y a pas d'autre choix.


LLH : Votre roman a-t-il suscité des réactions du monde politique que vous égratignez ?

DD    : Pour l'instant, je n'ai pas d'information à cet égard. Cela doit être dû au fait que les personnalités politiques contemporaines lisent peu de romans. Mais cela viendra peut-être.


LLH : Avez-vous un nouveau roman en cours et si oui, a-t-il encore pour décor la politique ?

DD    : Je n'ai pas de roman en cours. Mais je veux trouver l'idée du prochain. Vite. Peut-être y aura-t-il encore la politique en toile de fond, peut-être pas autant, peut-être pas du tout. Je n'en sais encore rien. Ce que je sais, en revanche, c'est que j'ai pris goût à raconter des histoires. Je ne pourrai plus m'en passer.


  Encore une fois, un grand merci à David Desgouilles pour son temps et sa gentillesse. Vous trouverez  un lien pour accéder à la chronique du roman de David, Le bruit de la douche ici .


dimanche 5 juillet 2015

Le bruit de la douche




Le bruit de la douche de David Desgouilles aux éditions Michalon



   Nous sommes le 14 mai 2011. Nafissatou Diallo s'apprête à refaire la chambre 2806 du Sofitel de New York. Le casque de son MP3 vissé sur les oreilles, elle entre dans la chambre. Soudain la musique s'éteint, elle avait oublié de recharger son lecteur la veille. Elle entend le bruit de la douche qui coule dans la salle de bains. L'occupant de la chambre avait oublié d'accrocher le signe ne pas déranger à sa poignée de porte. Nafissatou Diallo, resort de la chambre et continue de vaquer à ses occupations.

   Voilà le point de départ de ce roman de politique fiction. Que se serait-il passé si la femme de chambre la plus célèbre du monde avait entendu le bruit de la douche ? Que serait il advenu si Dominique Strauss Kahn ne l'avait pas croisée dans la chambre? Quelles en auraient été les conséquences pour le patron du FMI, pour la France ?

   Rien ne s'est passé à New York, Dominique Strauss Kahn rentre en France et annonce sa candidature aux primaires socialistes pour les élections présidentielles. L'issue de ces primaires ne fait aucun doute. DSK sera le candidat du parti socialiste aux présidentielles. Pour s'assurer la victoire finale, il décide d'embaucher Anne-Sophie Myotte, la conseillère de Montebourg pour ratisser large. Cette dernière, économiste et fervente souverainiste, est partisane de la sortie de l'Euro.


    Dans cette uchronie politique, David Desgouilles nous décrit par le menu les tractations qui se déroulent en coulisses entre les partisans des différentes mouvances au sein du parti socialiste, les réactions de l'autre camp. Toutes les têtes d'affiches du monde politique français sont présentes et le moins que l'on puisse dire est que ce monde n'est pas reluisant. L'auteur nous montre un univers dans lequel les convictions ne pèsent pas lourd quand il s'agit d'acquérir le pouvoir ou de s'assurer un maroquin ministériel. Seule Anne-Sophie paraît pure, fidèle à ses opinions, mais pour combien de temps ? Il le fait avec précision, avec un humour désenchanté. Un roman passionnant même pour les lecteurs, qui, comme moi, ne sont pas férus de politique. Le bruit de la douche est un excellent premier roman.

Retrouvez l'interview que m'a accordée David Desgouilles ici.




   

vendredi 3 juillet 2015

L'art d'écouter les battements de coeur




L'art d'écouter les battements de coeur de Jan-Philipp Sendker aux éditions Le livre de poche




   Julia Win, jeune avocate à New York est bien décidée à connaître les raisons de la disparition de son père. Pourquoi ce père les a laissées, elle et sa mère, un beau jour, sans aucune explication, sans aucun signe annonciateur de cet abandon. Dans un carton contenant ses affaires, elle retrouve une lettre de sa main, jamais envoyée, adressée à une certaine Mi Mi. Elle décide de partir en Birmanie, pays d'origine de son père, déterminée à lui demander des explications.

   A son arrivée dans ce pays où tout lui est étranger, elle rencontre U Ba, un vieil homme, qui a son grand étonnement semble savoir beaucoup de choses sur elle. Le vieil homme connaît son père et se met à lui raconter son histoire. Une histoire que la jeune femme ignorait complètement, son père n'ayant jamais parlé des premières années de sa vie. Le vieil homme lui raconte la vie de Tin Win, abandonné par sa mère au décès de son père. Un jeune garçon exceptionnel ayant la capacité d'entendre et d'interpréter les battements de coeur. Ce don va lui permettre de rencontrer l'amour, le vrai, en la personne de Mi Mi.

  " "Croyez vous en l'amour Julia ?
    "Bien entendu, je ne fais pas référence à ces explosions de passion qui nous poussent à dire et à faire des choses que nous regrettons ensuite, qui nous amènent à croire que nous ne pouvons pas vivre sans telle ou telle personne et que la simple idée de la perdre nous laisse tremblants d'angoisse - un sentiment qui appauvrit plus qu'il ne nous enrichit puisque nous brûlons de posséder ce qui nous échappe, de nous raccrocher à ce qui se dérobe."
     "Non. Je parle d'un amour qui rend la vue aux aveugles. D'un amour plus fort que la peur. Je parle d'un amour qui insuffle du sens à la vie, qui résiste aux lois naturelles de l'usure, qui nous épanouit, qui ne connait aucune limite. Je parle du triomphe de l'esprit humain sur l'égoïsme et la mort.""

  En découvrant l'histoire de son père et de Mi Mi, Julia subit un véritable choc. Un choc culturel, tout en Birmanie est si éloigné des préoccupations d'une jeune avocate américaine mais surtout un choc émotionnel qui va remettre en question tout ce qu'elle pensait savoir sur son père, sur la vie. Et si le sens de la vie était l'amour, cet amour vrai qui transcende tout, ce sentiment profond qui se joue de l'espace et du temps.

   L'art d'écouter les battements de coeur est un superbe roman aux allures de conte de fées. Un hymne à l'amour, une ode à la vie. Une histoire qu'il faut prendre son temps pour déguster. Un superbe roman porté par la plume poétique de Jan Philipp Sendker. Une poésie empreinte de sagesse orientale qui m'a beaucoup touché. Voici un livre qui transporte, qui émeut, un livre qui fait du bien. N'hésitez pas à le mettre dans votre valise avant de partir en vacances cet été.

   "(...) l'amour a tant de visages différents que notre imagination n'est pas préparée à les voir tous.
     - Pourquoi faut-il que tout soit difficile ?
     - Parce que nous ne voyons pas ce que nous savons déjà. Nous projetons nos propres valeurs - les bonnes comme les mauvaises - sur l'autre. Ensuite nous reconnaissons pour de l'amour ce qui, d'emblée, correspond à l'image que nous nous en faisons. Nous souhaitons être aimés comme nous-mêmes nous saurions aimer. Une approche différente nous met mal à l'aise. Nous réagissons de façon soupçonneuse et dubitative. Nous interprétons les signes de travers. Le langage nous est incompréhensible. Nous accusons. Nous affirmons que l'autre ne nous aime pas. Mais peut-être nous aime-t-il simplement selon son idiosyncrasie, que nous sommes incapables de reconnaître."