Rencontres

dimanche 28 juin 2015

Souvenirs de lecture 16 : Jules Gassot



Souvenirs de lecture 16 : Jules Gassot



   Nous avons tous de ces lectures qui nous ont profondément touchés, qui sont comme des madeleines de Proust : on se souvient d'où on était quand on les lisait, quel temps il faisait. Il m'a semblé intéressant de savoir quelles lectures avaient marqué les auteurs que nous lisons et en quoi elles avaient influencé leur désir d'écrire. Aujourd'hui c'est Jules Gassot qui me fait l'honneur de répondre à mes questions. Je le remercie pour son temps précieux, sa gentillesse et sa disponibilité.



LLH : Quel livre lu dans votre adolescence vous a le plus marqué et pourquoi ?

JG    : Ce serait Le Horla de Maupassant, que j'ai découvert en cours de Français. Le texte est court et le plaisir immense. Pour la première fois j'ai compris qu'on pouvait écrire sur la folie et toucher les étoiles. Ses angoisses devenaient les miennes, ses rêves étaient les miens, son journal était le reflet de mes propres interrogations. "Cette nuit, j'ai senti quelqu'un accroupi sur moi, et qui, sa bouche sur la mienne, buvait ma vie entre mes lèvres." C'est ça Maupassant, un langage sec, fulgurant, dévastateur. J'en ai fait un court métrage à  18 ans, et je ne désespère pas d'en faire un film un jour.




           Puis il y a l'adulescence, la période où étudiant vous lisez pour votre plaisir, sans avoir besoin d'attendre qu'un professeur vous demande quoi que ce soit. Un peu par hasard je suis tombé sur Louis Calaferte et son Septentrion. Ma bible, ma religion. Censuré puis réimprimé vingt ans plus tard, cette autobiographie est un bijou. Chaque phrase est une merveille, ciselée, précise, criminelle. Jugez vous-mêmes. "J'attends qu'une épidémie purificatrice nettoie l'anatomie du monde, mais si cela se produisait, la nuit suivante je porterais le germe dans la masse en voie de guérison." Tout est là. L'envie et le désespoir, la force et la fragilité, un grand bonhomme. Son océan de fantasmes oscille entre la nausée profonde et la violence des mots. Ce texte, c'est la vie, en mieux. Calaferte m'a  fait aimer les femmes encore plus , puisqu'il les regarde avec un oeil magnifique. "Déversoir de toutes les faiblesses, de tous les ratages. La femme est un écran entre la peur de vivre et celle de mourir. Nous nous heurtons à elle comme à un suicide manqué."


LLH : En quoi ce livre a-t-il eu une influence sur votre désir d'écrire ?

JG    : Peut-être une façon de communiquer avec lui puisque la tombe nous sépare. Si j'ai été influencé par Septentrion, c'est que ce que j'ai écrit ne ressemble pas à ce que j'aurais aimé écrire. Ce n'est pas un livre confortable, c'est devenu une urgence, une maladie à soigner, un combat avec la vie. J'ai eu besoin de cracher ce que je ressentais. Si influence il y a, ça a été de composer avec la sincérité, qui ressemble rarement à l'héroïsme. Et cette honnêteté je la dois à mon éditeur Stéphane Million, qui m'a soutenu dès le départ. L'écriture m'a sauvé. La mienne, et celle des autres. Si Louis Calaferte, Guy de Maupassant ou encore Françoise Sagan et Roland Jaccard n'avaient pas écrit, je n'aurais jamais songé à le faire. Pas parce que je me sens doué comme eux, mais parce que je serais resté ignorant. Il y a tellement de portes à ouvrir quand on écrit qu'il y en a bien une qui finit par nous faire du bien.


LLH : Quelles sont vos dernières lectures coups de coeur ?

JG   : Karoo, de Steve Tesich, un trésor d'humour et de désillusions. Il serait dommage de passer à  côté.

      Fermé la nuit, de Paul Morand, un observateur hors norme, une exigence rare, un style diabolique.

          La chute de cheval, de Jérôme Garcin, pour les amoureux des équidés et des belles lettres, l'auteur se livre à coeur ouvert. Élégant, brillant et délicat.

          Hollywood, de Charles Bukowski, Los Angeles est une ville abominable, je ne suis pas le seul à le penser.

         Et parce qu'il n'y a pas que les livres de poche dans la vie, j'ai craqué pour la tendresse de Fanny Salmeron. Son dernier livre, On ne joue pas avec les épées, est un recueil de nouvelles terriblement accrocheur.


Biographie

         Je suis né dans les années 80 d'un père français et d'une mère suisse. J'ai une soeur formidable avec qui j'ai grandi à Paris. Après des études d'économie j'ai tout plaqué pour aller travailler sur des longs métrages comme assistant. De film en film j'ai eu envie d'en savoir plus et me suis inscrit dans une école de cinéma en Belgique où j'ai plongé dans le 7ème art. A la sortie tout se complique, les financements se font rares, les rêves se brisent mais je rencontre un éditeur qui me tend la main. Aujourd'hui je sais que l'homme n'est pas toujours bon, mais je fais confiance aux femmes pour changer ça.

       Jules Gassot est l'auteur d'un premier roman On a tué tous les Indiens, paru dernièrement aux éditions Robert Laffont. Vous trouverez ma chronique de ce fabuleux premier roman en suivant ce lien. http://leslecturesduhibou.blogspot.fr/2015/04/on-tue-tous-les-indiens.html

       Encore un grand merci à Jules Gassot pour sa gentillesse et sa disponibilité.

       Les titres des romans cités par Jules Gassot ayant fait l'objet d'une chronique sur ce blog apparaissent colorisés et disposent d'un lien vous permettant d'accéder à la chronique d'un simple clic.

mercredi 24 juin 2015

Souvenirs le lecture 15 : Juliette Bouchet




Souvenirs de lecture 15 :Juliette Bouchet



   Nous avons tous de ces lectures qui nous ont profondément touchés, qui sont comme des madeleines de Proust : on se souvient d'où on était quand on les lisait, quel temps il faisait. Il m'a semblé intéressant de savoir quelles lectures avait marqué les auteurs que nous lisons et en quoi elles avaient influencé leur désir d'écrire. Aujourd'hui c'est Juliette Bouchet qui me fait l'honneur de répondre à mes questions. Je la remercie pour son temps si précieux, sa gentillesse et sa disponibilité.


LLH : Quel livre lu dans votre adolescence vous a le plus marqué et pourquoi ?


JB    : Deux auteurs ont marqué ma jeunesse : Barjavel que j'ai dévoré très tôt en commençant par "Ravage" et dont j'ai adoré l'univers "fin du monde"instinctivement, parce qu'il exprimait une vision de l'avenir à laquelle j'adhérais totalement et Jacques Prévert dont le poème "je suis comme je suis" est devenu  une espèce de mantra pour moi à tel point que je l'avais recopié sur la porte de mon armoire, dans ma chambre (ce qui avait moyennement amusé ma mère).

           Le livre est un moyen de transport formidable. Il emmène d'un point A à un point B, d'une époque révolue à une autre en devenir et s'offre le luxe des mondes parallèles, rêvés, et merveilleux. Un véhicule à bord duquel on monte sans connaître sa destination et où on peut projeter son propre paysage.

     Barjavel m'a montré que la liberté était une question d'imagination. J'avais douze ans.


LLH : En quoi ce livre a-t-il eu une influence sur votre désir d'écrire ?

JB     : Aucun de ces livres n'a influencé mon "désir" d'écrire qui n'en était pas un. J'ai écrit avant de les découvrir, par besoin et sans jamais chercher à intellectualiser cette nécessité. La voie d'expression silencieuse et foisonnante de l'écriture est née avec son apprentissage, à l'école. Les mots me plaisaient terriblement. Les sens cachés, les métaphores, les rimes, les cadences. J'y ai découvert un terrain de jeu formidable, une source de plaisir sans fin, mais surtout, un moyen de m'exprimer contre lequel je ne savais pas lutter. Mes grands-parents et mes parents me disaient "tu devrais être écrivain", ce que j'avais mis dans un coin de ma tête, pensant alors que je pourrais très bien m'en passer, sauf que les années n'ont fait que renforcer cette veine encrée qui palpitait sous la pulpe de mes doigts jusqu'à ce que je mette mes pieds dans le plat et mon coeur au four avec mon premier roman. (Et donc, du coup, j'ai compris tout un tas de trucs).


LLH : Quelles sont vos dernières lectures coups de coeur ?

JB    : "Le roi, le sage et le bouffon" de Shafique-Keshavjee.
           "Mon chien stupide" de John Fante
           "Traité d'athéologie" de Michel Onfray

            J'ai une très mauvaise mémoire, j'oublie quasi instantanément tout ce que je lis. (J'ai honte mais j'assume).



Biographie



 Je suis née à Paris, pas très loin de la Tour Eiffel. J'ai emprunté plusieurs chemins avant de trouver le bon (qui était en fait celui de base mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué). J'ai deux enfants épuisants et très malicieux, un homme patient dont le calme rassurant trouve son équilibre au creux de ma vague déchaînée. Je ne vis plus à Paris mais dans le Berry depuis trois longues années et j'écris toute la sainte journée. Le sport me canalise, les mots m'apaisent et l'alcool me rend malade. Je fume un peu et je n'ai pas d'animaux. Mon potager me désespère mais comme pour tout je ne m'avoue jamais vaincue.

          Le double des corps, le premier roman de Juliette Bouchet a été publié récemment chez Robert Laffont.


          Le titre du roman de Juliette  Bouchet est colorisé et dispose d'un lien vous permettant d'atteindre la chronique écrite à  son sujet sur ce blog, d'un simple clic.

          Encore une grand merci à Juliette Bouchet pour sa gentillesse et sa disponibilité. Je vous invite à découvrir d'urgence Le double des corps, son premier roman, un livre délicieusement transgressif.

jeudi 18 juin 2015

Souvenirs de lecture14 : Alain Cadéo




Souvenirs de lecture  14 : Alain Cadéo


   Nous avons tous de ces lectures qui nous ont profondément touchés, qui sont comme des madeleines de Proust : on se souvient d'où on était quand on les lisait, quel temps il faisait. Il m'a semblé intéressant de savoir quelles lectures avaient marqué les auteurs que nous lisons et en quoi elles avait influencé leur désir d'écrire. Aujourd'hui c'est Alain Cadéo qui me fait l'honneur de répondre à mes questions. Je le remercie pour son temps précieux, sa gentillesse et sa disponibilité.


LLH : Quel livre lu dans votre adolescence vous a le plus marqué et pourquoi ?

AC   : Mes premières locomotives-lectures à la vapeur furent les Russes dans ce brouillard de l'adolescence. Tourgueniev sans doute, Gogol, Tchekov et enfin Dostoïevski. Les lourdes traductions, le nom des personnages, l'extrême complexité de l'âme humaine, l'orgueil, l'humilité, la petitesse et la grandeur, le saint, l'anachorète et criminel, le serf, le nouveau riche, l'aristocratie de campagne, tout s'offrait à moi dans un désordre succulent. Même si j'avais du mal à tout comprendre je sentais bien qu'il y avait là-dessous le foisonnement passionnel d'une humanité au bord de la rupture. Là enfin rien n'était logique et raisonnable et dans ce maelström de sentiments l'adolescent que je suis, que j'étais, pressentait la richesse du monde.


LLH : En quoi ce livre a-t-il eu une influence sur votre désir d'écrire ?

AC   : Désir d'écrire. Adolescent, à la périphérie des villes, la nuit, dans un demi-sommeil, on perçoit quelques fois, le bruit assourdissant d'une moto en fuite et l'on suit longtemps cette rumeur qui n'en finit plus de disparaître. Tous les livres que j'aimais étaient de la même manière "invitations au voyage". Dehors, ailleurs, plus loin , autrement. Alors écrire c'était bouleverser la quiétude des roupilleurs, "Fuir, là bas, fuir"... Petit Marco Polo des coeurs j'avais à découvrir l'immensité d'une réalité suggérée par l'écrit. Mettre ses pas dans les traces toujours fraîches des grands aventuriers de l'esprit. Aller le plus loin possible dans une réalité que l'on peut, que l'on doit transcender. Aller au-delà du petit "moi" étriqué, foutre le camp dans les pampas éternellement vierges de tous nos possibles. Voilà quel serait mon "job".


LLH : Quelles sont vos dernières lectures coups de coeur ?

AC   : Mes dernières lectures. Les classiques en boucle, d'Homère à Jean Giono, de Montaigne à Miller, avec parfois de délicieuses lectures contemporaines...


Biographie

   Il vous faut un élément "biographique"... Hélas, biographie, sismographie, au battement de coeur près il y faudrait un livre et ce serait indigeste et illisible. Et puis parler de soi, ça vous a un côté réducteur de têtes, Jivaro de la pensée moderne et je suis très mauvais empailleur et n'ai aucun culte pour la taxidermie. Je vous laisse donc libre d'inventer, vos intuitions sont sûrement fulgurantes, fiez vous comme moi à ce que vous éprouvez lorsque vous touchez l'émotion pure.

  Dramaturge et romancier, je n'ai pour l'instant lu d'Alain Cadéo que son superbe Zoé, publié chez Mercure de France en 2015 et dont vous trouverez ma chronique ici.


Encore un grand merci à Alain Cadéo pour sa gentillesse et sa disponibilité. Si vous ne connaissez pas encore la plume pleine de souffle, de fantaisie, de poésie de cet auteur, je vous invite à la découvrir d'urgence.



mardi 16 juin 2015

La grande interview d'un petit rien




La grande interview d'un petit rien de Garance Terrere aux éditions Persée





 "Je suis un petit rien parmi les petits riens qui forment le tout. Je suis donc une partie du tout. Je ne suis rien du tout."

   Alors quand Garance, ce "petit rien" est contactée pour une interview, elle se demande si ce n'est pas une plaisanterie. Elle qui n'a pas été écoutée,  que peut-elle donc avoir de si intéressant à dire? La journaliste, une journaliste vedette , se présente pourtant pour l'interview. Garance, peu convaincue de l'intérêt d'une telle démarche se livre. Elle livre son âme, ses doutes, ses révoltes, ses succès, ses échecs. Elle dévoile ce qu'elle est, ce qui fait sa vie.

  "Ma vie se déroule comme un chemin de montagne : tantôt des côtes, tantôt des descentes, souvent des culs-de-sac et, tout aussi souvent de magnifiques points de vue sur l'horizon qui cachent encore un autre horizon. Des chemins agréables et parfumés qui deviennent rocailleux, glissants."

 Et elle en a des choses à dire, Garance, des choses qui nous concernent tous, des mots qui nous touchent au plus profond. Elle le fait sans fard, avec sincérité, la sincérité des révoltés qui n'ont jamais osé parler. Tout ce qu'elle a tu , sort, explose, (tue). C'est émouvant, poignant. Le style est prometteur.

  J'ai longtemps hésité avant d'écrire cet avis , je ne voulais surtout pas nuire à ce texte sincère et utile : la voix de ceux qui se taisent. Mais après le coup de coeur vient le coup de gueule.  Un coup de gueule contre ses "pseudos" éditeurs qui profitent du désir des aspirants auteurs d'être lus, d'être entendus. Ce roman si touchant, où l'on sent, où l'on lit le talent, est plombé par les coquilles qui en  gâchent la lecture. Un vrai éditeur aurait accompagné l'auteur dans son travail, lui aurait demandé de retravailler certains passages. Mais ici il s'agit d'autoédition. Ces "éditeurs" escrocs qui soutirent de l'argent aux auteurs pour que leurs textes soient publiés, sans fournir le moindre travail, sans conseiller les auteurs, sans leur demander de retravailler leur texte pour qu'il donne sa pleine mesure. Ces "éditeurs" qui ne sont en fait que des imprimeurs. J'ai compris au contact d'auteurs, le parcours du combattant que représente la publication d'un livre. Amis auteurs, je ne suis qu'un lecteur passionné, je n'ai jamais ressenti les affres de l'attente de la réponse d'un éditeur, mais ne vaut-il pas mieux être patients, retravailler son texte encore et encore, être vigilants sur le travail d'édition plutôt que de se tirer une balle dans le pied en confiant son texte, ses mots à une entreprise qui ne voit que le profit immédiat et se moque de votre texte ? Mais c'est vrai qu'il est difficile de peser le pour et le contre entre l'autoédtion, immédiate, et la difficulté de se faire lire, et conseiller par les maisons d'éditions classiques qui croulent sous les manuscrits et qui n'ont pas forcément le temps, ni l'envie de prendre le risque d'éditer des inconnus.

  Malgré tout, ce qui ressort de ce livre c'est l'émotion, la sincérité et je ne peux que vous conseiller de laisser sa chance à ce livre : confiture donnée à un cochon d'éditeur. J'espère que comme moi, malgré ma colère, d'autant plus vive que ce livre m'a ému, vous passerez au-dessus de ces coquilles et apprécierez ce livre qui résonne encore en moi.


lundi 15 juin 2015

Souvenirs de lecture 13 : Cathy Galliègue



Souvenirs de lecture 13 : Cathy Galliègue


   Nous avons tous de ces lectures qui nous ont profondément touchés, qui sont comme des madeleines de Proust : on se souvient d'où on était quand on les lisait, quel temps il faisait. Il m'a semblé intéressant de savoir quelles lectures avaient marqué les auteurs que nous lisons et en quoi elles avaient influencé leur désir d'écrire. Aujourd'hui c'est Cathy Galliègue qui me fait l'honneur de répondre à mes questions. Je la remercie pour son temps précieux, sa gentillesse et sa disponibilité.


LLH : Quel livre lu dans votre adolescence vous a le plus marqué et pourquoi ?


CG   : Il y a eu mon premier choc littéraire, une sorte d'émerveillement devant la justesse des mots, leur musique, des guirlandes qui se déroulent et vous chatouillent le nez quand l'auteur agite un brin d'herbe sèche. C'est Colette, c'est Le blé en herbe.

           Quand j'ai ouvert ce livre, j'ai été littéralement happée par l'odeur d'été qui s'en échappait, par le souffle du vent dans le sable, par le goût des corps qui découvrent l'amour.

            Avant de le découvrir, je ne savais pas que c'était possible.
            J'ai écrit très tôt, toujours je crois, mais avec ce livre, j'ai reçu une gifle magistrale, comme une maîtresse d'école qui m'aurait dit en me tendant ce texte "C'est bien ma petite, mais l'écriture c'est ça, travaille encore.

            Le blé en herbe, c'est un festival de détail ciselés et d'émotions qui transpercent le papier et s'étalent sur la peau en frissons.


LLH : En quoi ce livre a-t-il eu une influence sur votre désir d'écrire ?

CG   : Le désir d'écrire était là bien avant la découverte de ce livre. Il m'est tombé dessus je crois, avec le premier livre que j'ai lu, et ce livre je l'ai lu avec les oreilles !

           J'étais enfant et on m'a offert Le Petit Prince en 33 tours. Je l'écoutais chaque jour. C'était la voix de Pierre Arditi, je crois, qui racontait des leçons de vies d'une simplicité enfantine, tellement que les adultes ne semblaient pas les connaître.

           Je l'ai voulu ensuite en papier. Et j'ai lu avec les yeux, c'était encore plus beau.

          Le blé en herbe n'a donc pas été le livre qui m'a donné envie d'écrire mais il a été celui qui m'a donné envie de chercher l'écriture juste, de me faire mal si nécessaire, mais ne pas me satisfaire de mots simplement jolis.


LLH : Quelles sont vos dernières lectures coups de coeur ?

CG   : Dernièrement, de très beaux premiers romans m'ont particulièrement touchée.
           Leurs auteurs étant, comme moi, des addicts des réseaux sociaux, nous avons pu échanger, rire, et même prévoir de nous rencontrer "IRL". Du coup, le roman prend vie, l'auteur existe, il parle aussi, il n'est pas muré dans un silence d'écrivain inspiré. Pas toujours.

           On a tué tous les Indiens de Jules Gassot, j'ai aimé vraiment beaucoup ! Et puis Fragments d'une traque amoureuse, de la pétillante Fleur Zieleskiewicz, Manuel d'écriture et de survie de Martin Page (que je recommande à tous les auteurs en herbe) et bien sûr, L'écriture et la vie de Laurence Tardieu.


Biographie


   Aime-moi...comme tu es, est mon premier roman, mais certainement pas le dernier. Ancienne blogueuse, j'étais habituée à cette zone de confort, ce format court, des chroniques qui ébouriffent, je repoussais autant que possible le moment de me jeter dans le grand bain. Et une main bienveillante m'a poussée en me tendant la perche pour ne pas que je me noie.

   Quand le dernier mot a été posé, je savais que le plus difficile restait à venir : séduire un éditeur.

   Cet éditeur, c'est Kawa, représenté par Henri Kaufman qui est arrivé par la magie de la sérendipité. Dès lors tout est allé très vite, les choses sont simples avec Henri, qui actuellement développe une collection "premier roman".

   Mon prochain roman est en cours d'écriture. Je vais le terminer sur un autre continent, sur une ligne symbolique : l'équateur. Mais je garde un pied à Paris pour ne pas me couper du monde littéraire.



Quelques titres des romans cités par Cathy Galliègue sont colorisés. Ils disposent d'un lien vous permettant d'accéder directement à mes chroniques les concernant.

Encore un grand merci à Cathy Galliègue pour sa gentillesse et sa disponibilité. Je vous invite à découvrir le superbe premier roman de Cathy, Aime-moi...comme tu es, un grand coup de coeur pour moi. Vous pouvez d'ailleurs le gagner ici.

Cathy nous offre aussi une vidéo dans laquelle elle nous parle de l'écriture de son premier roman et de son édition. C'est ici !


Code 93



Code 93 d'Olivier Norek aux éditions Michel Lafon





  Ce roman nous plonge dans le 93, département qui détient le triste record du pire taux de criminalité. L'économie souterraine , les meurtres, les règlements de comptes en tous genres y sont monnaie courante. Alors que l'équipe du capitaine Coste va perdre, en la personne de Mathias Aubin, second du chef du groupe, l'un de ses éléments majeurs, une affaire bien mystérieuse leur tombe sur le râble. Imaginez, une victime de meurtre qui se réveille sous le scalpel du légiste, une apparente combustion spontanée, et un cadavre vidé de son sang et dont le cou porte les traces de deux trous (Vampire or not vampire). A ces corps mis en scène s'ajoutent les messages anonymes que reçoit le capitaine et qui l'orientent vers des affaires passées.


  Le roman de Norek est passionnant car il nous plonge à l'intérieur même du système. Olivier Norek étant flic avant d'être écrivain, le roman se caractérise par son authenticité. Ici pas d'extraordinaire, pas de superflic, mais une équipe qui se heurte au quotidien. Un polar qui nous montre la vie dans le 93, cette jungle de béton. Un polar qui met le doigt où ça fait mal, qui nous montre qu'être flic dans le 93 n'est pas une sinécure, mais où la force des flics réside dans leur amitié, dans leur solidarité. Comment tiendraient-ils sans cette camaraderie. Un polar qui dénonce les petits arrangements entre politiques, monde de la finance et hiérarchie policière.


   "-Vous vous trompez, Coste, les chiffres sont tout, exactement pour cette raison. C'est parce qu'on peut tout leur faire dire qu'on les fait tant parler. Plus particulièrement ceux de la délinquance et de la criminalité dont les conséquences ont des répercussions à une multitude de niveaux. "


  Code 93 est un livre passionnant qui se lit d'une traite. S'il est aussi passionnant, cela relève surtout de cette authenticité que l'on sent à chaque page. Une 'authenticité qui réside aussi dans le style de son auteur, net, précis sans fioritures. J'ai aimé ce roman mais malgré tout ce n'est pas un coup de coeur. J'ai été un peu déçu de connaître le coupable assez tôt dans le roman. Mais malgré tout  mon avis sur ce premier roman reste très positif. Il se dévore.



samedi 13 juin 2015

Le double des corps



Le double des corps de Juliette Bouchet aux éditions Robert Laffont



    "Six mois, trois semaines, douze jours, vingt et une heures et trente quatre minutes d'abstinence."

     Voilà ce qui taraude le belle Julia. La trentaine superbe, elle rêve de la rencontre, de l'amour, mais surtout elle rêve de sexe, de plaisir, elle veut jouir comme un homme.

   "Je suis dans l'impasse. La solution pour éviter un retour sur le divan de mon psy est d'essayer une baise sans lendemain. Pour voir. Qui sait."

   Julia va multiplier les rencontres, les aventures. Elle nous les raconte sans tabou. Mais que cherche-t-elle dans cette course effrénée ? L'amour, le plaisir sans lendemain, immédiat ? La vie de couple, elle n'y croit plus.

    "Pour moi, le couple, c'est de la bombe atomique. Limpide. Enfin ça devrait. Sauf qu'on est tous pourris par nos égoïsmes sournois. D'odieux fornicateurs dodus, faux-culs inconstants. Voilà ce qu'on devient, à force d'exiger le meilleur de chacun, en offrant le pire de nous-mêmes."

   La multiplication des aventures, la fuite en avant de Juliette, les déceptions, vont lui faire perdre tout contact avec la réalité et la faire sombrer dans la folie meurtrière. Pour échapper à la police, elle se rend chez un vieil ami transformiste qui va l'aider à modifier son apparence. Elle va finalement devoir quitter la France.

  Dans ce roman délicieusement transgressif, flirtant allègrement avec le "trash". Juliette Bouchet nous parle de sexe, d'égalité face au sexe. Pourquoi les hommes et les femmes ne pourraient-ils pas aimer de la même façon ? Pourquoi un homme multipliant les conquêtes apparaît-il comme un Don Juan alors q'une femme est méprisée, traitée de "salope" si elle agit de même? Elle nous parle aussi de le complexité de l'identité sexuelle. Ce roman plein de souffle, porté par une plume acide, crue, inventive,  mais aussi poétique, se lit d'une traite tant le rythme y est soutenu. Ce qui m'a manqué dans ce roman pour qu'il soit un coup de coeur c'est un brin d'émotion mais là n'était pas le propos. Le double des corps est un excellent premier roman. J'y ai découvert une plume prometteuse que je vais suivre avec intérêt.

 "Gilles a développé sa maladie suite à un choc affectif. Pour une raison inexplicable, il a inversé le syndrome. Au lieu de lancer des insultes à tort et à travers, il crache des mots d'amour, débite des promesses de bonheur éternel, assène des douceurs que les femmes n'osent plus écouter. Autre éventualité, le syndrome a muté. Qu'y-a-t-il de plus commun aujourd'hui que la vulgarité ? La vraie transgression, c'est d'aimer à coeur ouvert. La pire des insanités est d'espérer. Heureusement pour moi, je suis à l'abri de la moindre particule d'espoir. Je suis donc efficace puisque désensibilisée."


jeudi 11 juin 2015

Concours Aime moi comme tu es



Concours Aime moi comme tu es









   Hier je vous parlais de ce superbe roman qu'est Aime moi comme tu es. Bonne nouvelle pour vous petits veinards. Cathy Galliègue et les éditions Kawa me donnent la possibilité de vous le faire gagner. Pour cela rien de plus simple. Répondez au 5 questions suivantes. Elles sont simples les réponses se trouvent sur ma chronique ici et sur le site des Editions Kawa,

  Les réponses devront être envoyé avant le 19 juin midi à l'adresse mail suivante : leslecturesduhibou@outlook.fr. Merci de bien vouloir préciser vos coordonnées et de mentionner en objet : Concours Aime moi comme tu es. Adresse de secours au cas où le première ne fonctionnerait pas  : denisarnoud@hotmail.com . Tentez votre chance!!! C'est parti ! Voici les questions.

1 : Quel est la nationalité de l'ex-mari d'Emmanuelle ?

2 : Quel est le métier de Tom ?

3 :Dans quel pays Tom ne s'est pas rendu au cours de ses missions? 
        Afghanistan
        Libye                  
        Irak
        Syrie

4 : Quel est le nom du compositeur de la chanson du livre ?

5 : Pour vous départager, combien de participants tenteront leur chance à ce concours ?


 L'heureux gagnant remportera le roman dédicacé par l'auteur.


Ric rac



Ric rac d'Arnaud Le Guilcher aux Edtions Robert Laffont



   Jean-Yves, Jeanyf pour sa famille, a quatorze ans. Il est apprenti footballer. Ballon au pied il n'a peur de personne. C'est un technicien hors pair. Seulement, Jean-Yves est tout petit et cela pose problème à l'encadrement de son centre de formation. Pour pouvoir y rester et faire la carrière dont il rêve et qui lui permettra de quitter La Sourle, il doit grandit de 20 cm en deux mois.

   La Sourle c'est là que vit Jeanyf quand il n'est pas au centre de formation. La Sourle c'est le "trou du cul du monde" et Jeanyf et son père vivent à l'écart du village. Sa mère et morte et son père, marionnettiste ne s'en est jamais remis. Il transforme la maison, le jardin en un mausolée à la mémoire de sa femme Yvette. C'est là que Jeanyf tracassé par son problème de taille (et de taille il l'est son problème) va passer ses deux mois de vacances au contact des membres de sa famille tous plus déjantés les uns que les autres. Le père dont j'ai déjà parlé Pierryf, son oncle, Jackyf , herboriste original, et son fils Soubirou, illuminé depuis qu'il a vu la vierge.

  C'est dans cette ambiance que Jeanyf va devoir se battre avec son problème. Dès qu'il est tendu, triste Jeanyf va courir dans la forêt. Mais après quoi court-il? Après son avenir, après le fantôme de sa mère, après son premier amour, Bessie, qu'il vient de rencontrer et qui est la fille d'un couple qui a acheté la propriété voisine et qui veut y ouvrir une sorte de gîte rural sado-maso? Que fuit-il en avalant les kilomètres?

  Ric rac est un roman hilarant, désopilant. Les descriptions des personnages y sont savoureuses et délirantes à souhait :

   "Stacy a un look un peu chargé. Elle affiche des mèches rouges dans les cheveux, comme celles que se trimballent les copains du centre de formation quand ils repeignent leur scooter, sans faire gaffe au vent. Elle est émotive, Stacy. La moindre joie, la plus minuscule des contrariétés se lit sur sa trogne sous la forme de plaques rougeaudes. Elle trouve ça joli. Elle y voit un gage de son absolue honnêteté. "Comment voulez-vous que je mente ? Hein? Ça se verrait tout de suite." Stacy affiche une dernier "p'tit truc" à elle : un rouge à lèvre violet, appliqué en pâte épaisse, sur sa bouche mal dessinée.
     Cheveux fraise.
     Peau framboise.
     Lèvres figue.
     Le visage de Stacy ressemble à une salade de fruits rouges."

   Ce qui ressort de ce roman, à première vue, c'est son humour délirant, mais c'est aussi un livre plein de tendresse et d'émotion. La lutte d'un gamin pour s'extraire de sa famille de ce milieu qui le mine, qui l'empêche de grandir au sens propre comme au sens figuré. Certes sa famille l'aime et il aime sa famille, mais elle ne l'aide pas du tout à aller de l'avant. Avec une plume pleine de fantaisie, un style jubilatoire, Arnaud Le Guilcher nous dresse le portrait d'un adolescent qui doit quitter ses racines, sa cambrousse autant refuge que prison pour pouvoir se réaliser. Un grand plaisir de lecture. J'ai hâte de me plonger dans les précédents romans de cet auteur à l'univers si particulier.



   

mercredi 10 juin 2015

Aime-moi comme tu es



Aime-moi comme tu es de Cathy Galliègue aux éditions Kawa




   Emmanuelle vient de tout perdre. Prisonnière d'un mariage qui ne lui apporte plus grand chose, elle cède aux avances d'un de ses clients qui ne l'attire même pas. L'incartade est découverte par le mari qui la met dehors. Elle s'installe chez son amant mais après quelques semaines elle décide de fuir cet homme qui la dégoûte. Par l'intermédiaire d'un site de rencontres, elle fait la connaissance d'un gendarme corse qui lui présente son ami Tom. C'est le coup de foudre pour elle.


   "Et voilà. J'ai ouvert la porte et je suis tombée nez à nez avec un cheval de course, un pur sang, un être solaire aux grands yeux jaune-vert. Son casque de moto à la main, il a fait une sorte de pirouette sur mon paillasson, m'a offert un vrai sourire gentil.
     Je l'ai vite fait entrer pour pas qu'on me le pique !
     Mon homme idéal absolument imprévu. 


  Ils ne vont plus se quitter, il s'installe chez elle, ils filent le parfait amour. Les choses commencent à se gâter quand par manque d'argent, Emmanuelle doit se séparer de son appartement et aller vivre avec Tom à la caserne. Les signes d'amour de la part de Tom se font de plus en plus rares, il désire son Emma, mais ne sait pas, ne veut pas lui montrer qu'il l'aime. Emmanuelle quant à elle ne veut pas brusquer les choses. A toutes ses difficultés somme toute banales, vient s'ajouter le métier de Tom. Gendarme au GIGN, il doit régulièrement partir en opérations extérieures dans des pays guère rassurants (Irak, Afghanistan, Libye). Emmanuelle en plus de l'incertitude concernant les sentiments de Tom va devoir faire face au manque.


  Avec Aime moi comme tu es, Cathy Galliègue nous décrit la rencontre, la construction, la vie d'un couple. Un couple qui vit les mêmes bonheurs et les mêmes difficultés que les autres mais ou tout est rendu plus difficile du fait de l'éloignement régulier de Tom. Elle nous décrit ces scènes de vie de couple avec une sincérité qui nous happe. On s'attache à ce couple, on vit les difficultés avec lui, les joies aussi. On suit l'évolution de ces deux êtres si différents qui se sont trouvés. Emmanuelle, la femme blessée, Tom l'homme qui ne montre pas ses sentiments. Deux êtres qui vont s'apprivoiser, se soigner l'un l'autre.


 "Te souviens tu de ces tous premiers soirs, ceux des gestes élégants, des regards profonds, de ta délicatesse, te souviens tu comme nous nous étions promis de ne pas être les pansements de nos blessures passées ?
  Mon pauvre amour, au moment même où nous nous faisions cette promesse, tu était déjà collé sur mon échancrure béante. Tu colmatais, tu protégeais, tu soulageais, j'en oubliais la plaie, je me laissais cicatriser doucement, en confiance entre tes mains expertes.
  Tu ne t'en apercevais pas, mais tous ces bienfaits dégoulinaient de mon corps au tien, se répandaient sur tes blessures, je les voyais se refermer, chaque jour moins douloureuses que le précédent, tu lâchais du lest, je distillais des petites doses de bonheur sur tes écorchures, je soufflais sur le mal. Nous nous sommes délicieusement réparés."

  Le thème de la vie de couple est un thème délicat à traiter surtout quand il est observé comme ici de l'intérieur. On a vite fait de tomber dans les excès, dans la surenchère, dans le voyeurisme. Dans ce roman tout ce qui est décrit, l'est avec précision, crudité parfois, mais avec pudeur. C'est l'amour qui ressort. On ne tombe jamais non plus dans la mièvrerie. La plume pleine de souffle, de sincérité, d'humour, de poésie, de crudité de Cathy Galliègue, rend ce roman impossible à lâcher une fois commencé. Aime-moi comme tu es est un roman addictif, on ne veut pas le refermer, on veut continuer à vivre avec Emmanuelle et Tom. Une très belle réussite. Une plume très prometteuse que je vais suivre de très près.

  Avec le livre, en code flash, la chanson du livre spécialement écrite et composée et interprétée par Patricia Lenoir,  pour ce roman nous est offerte. Une illustration parfaite du roman. Cette chanson Cathy Galliègue m'a autorisé à vous la proposer ici.

   Un deuxième avis valant mieux qu'un voici celui de Sophie du blog Amis lecteurs vous trouverez sa chronique ici http://amis-lecteurs.blog4ever.com/galliegue-cathy-aime-moi-comme-tu-es

vendredi 5 juin 2015

Souvenirs de lecture 12 : Anne-Véronique Herter




Souvenirs de lecture 12 : Anne-Véronique Herter



   Nous avons tous de ces lectures qui nous ont profondément touchés, qui sont comme des madeleines de Proust : on se souvient d'où on était quand on les lisait, quel temps il faisait. Il m'a semblé intéressant de savoir quelles lectures avaient marqué les auteurs que nous lisons et en quoi elles avaient influencé leur désir d'écrire. Aujourd'hui, c'est Anne-Véronique Herter qui me fait l'honneur de répondre à mes questions. Je la remercie pour son temps précieux, sa gentillesse et sa disponibilité.


LLH : Quel livre lu dans votre adolescence vous a le plus marqué et pourquoi ?

AVH : En fait il y en a deux.


            Les livres qui m'ont le plus marquée dans mon adolescence sont L'Étranger de Camus et La Métamorphose de Kafka. A l'époque, j'écrivais déjà beaucoup, mais j'avais du mal à lire, à finir mes lectures, à me laisser envahir par une histoire.

            J'avais globalement du mal avec le principe de l'effort.

            Mon grand frère, de 10 ans mon aîné, s'est beaucoup occupé de moi lorsque j'étais petite.

           Un jour, il m'a mis L'Étranger entre les mains et m'a dit "Lis-le". Il a fait pareil  pour La métamorphose.

           Ces deux lectures m'ont remuée. Je me souviens les avoir lues avec une étonnante facilité et surtout une énorme fascination.

           Pourtant ce que j'ai aimé dans ces découvertes, la grande claque, ce ne fut pas ces lectures en elles-mêmes, mais ce qui suivit : les discussions passionnantes et passionnées que j'ai eues avec lui. L'écoute et le partage, l'échange que nous avons eu.

           Je me suis rendue compte que la lecture n'est en rien un plaisir solitaire. Ce que j'aime avant tout c'est la rencontre avec l'histoire, avec l'auteur mais aussi avec les autres lecteurs, les rapprochements et réflexions que cela apporte. C'est extrêmement nourrissant.


LLH : En quoi ces livres ont-ils eu une influence sur votre désir d'écrire ?

AVH : Ils n'ont pas eu d'influence sur mon désir d'écrire, parce que j'écrivais déjà lorsque je les ai découverts.

           En revanche, ils ont eu une influence sur mon désir de partager.

           Je me souviens d'avoir poursuivi ma mère dans toutes les pièces de la maison pour lui dire mes poèmes, TOUS mes textes... Si souvent.
           Pour ne pas la lasser, parfois, je les lui chantais... Ma pauvre maman...

           Cela m'arrive encore, lorsque je participe à un atelier d'écriture, par exemple celui du blog Bric à book tous les lundis, je poursuis mes propres enfants chaque dimanche soir ; j'arrive devant eux, je leur dis "je peux te lire" ? Avec mon petit sourire...
           Et eux me répondent d'un petit soupir de résignation... On éteint la TV ou on referme le livre, et on écoute maman réciter...

           Voilà ce que ces livres m'ont offert : le goût du partage.


LLH : Quelles sont vos dernières lectures coups de coeur ?

AVH : Une en littérature jeunesse :

            Tout foutre en l'air d'Antoine Dole, Actes Sud Junior. J'avais fait une chronique en commun avec mon fils de 15 ans sur mon blog (regards croisés adulte/ado).

            Deux premiers romans :

           On a tué tous les Indiens, Jules Gassot, Editions Robert Laffont (la chronique des lectures du hibou ici)
           Le double des corps, Juliette Bouchet, Editions Robert Laffont

           En roman illustré :

           Ma mère ne m'a jamais tenu la main, Thierry Magnier et Francis Jolly aux édition Le Bec en l'air.


Biographie


         Je suis née un 11 septembre. Celui de 1973.
         Pendant 28 ans, cette date n'a signifié que mon anniveraire.
         A cette heure, à ce jour, j'ai donc toujours 41 ans.

         Mon premier roman Zou ! est paru aux éditions Michalon fin août 2014.
         Mon baptême du feu en pleine rentrée littéraire. J'en suis sortie un peu broyée mais terriblement vivante. J'ai réussi à jouer des coudes et j'ai la chance d'avoir eu une belle visibilité pour mon petit Zou !

         Mon prochain roman est en cours de correction et devrait voir le jour pour la rentrée littéraire de janvier 2016.

          J'anime mon blog, je m'exerce à tous styles d'écriture, je participe à des événements littéraires, je rencontre, je partage. Bref Zou ! a changé ma vie !
          J'ai plusieurs autres vies... 2 enfants, une passion pour la mer, la plongée, l'apnée.
          Un amour éternel pour la Bretagne, et un travail.



Les titres des romans cités par Anne-Véronique Herter sont colorisés et disposent d'un lien vous permettant d'accéder à ses chroniques. Pour Zou! Le lien vous conduira directement à ma chronique sur ce superbe roman qui m'a beaucoup touché.

Encore un grand merci à Anne-Véronique Herter pour sa gentillesse et sa disponibilité. Si vous n'avez pas encore lu Zou !, je vous invite vivement à le découvrir. J'attends avec impatience la parution du prochain roman d'Anne-Véronique.




      




mardi 2 juin 2015

Virtuoso ostinato



Virtuoso ostinato de Philippe Carrese aux éditions de l'Aube




 Dans ce roman nous suivons Marzio Belonore à deux périodes de sa vie. Le roman s'ouvre en 1911 alors qu'une automobile est coincée dans une ornière à l'orée d'un champs à San Catello en Lombardie. Dans ce trou perdu, les automobiles on ne les connaît qu'en photo et on s'en méfie. A San Catello on vit encore comme au XIXème siècle, beaucoup des paysans du cru n'ont jamais vu la ville et s'en portent très bien.

  Parallèlement nous retrouvons Marzio, devenu violoniste virtuose qui se prépare pour un concert à la Scala de Milan en tant que soliste. Anxieux, il revient sur son passé, se remémore tous les événements qui l'ont conduit là, sur cette scène prestigieuse.

   Tout à donc commencé en 1911 quand cette voiture est restée coincée dans un fossé aux abords du champ de Volturno Belonore. Cette voiture transporte un employé de ministère de haut niveau vers un rendez vous d'importance. Pour ce sortir de ce mauvais pas et constatant le manque d'empressement de la famille Belonore à l'aider (à San Catello on s'occupe de ses affaires et tout ce qui est étranger est suspect), l'homme va faire croire au paysan que son champ contient un minerai très recherché, qu'il marche sur une fortune. Volturno est un homme droit dans ses bottes, sûr de son fait, il est déjà le petit roi du village, mais cette promesse de fortune va mobiliser toute son énergie, il ne va plus penser qu'à cet espoir de richesse et entraîner toute sa famille et le village dans sa folie prospectrice. Une folie qui va mener au drame.

  Virtuoso ostinato est un roman passionnant qui nous parle de folie, d'aveuglement. La folie du désir de richesse, la folie de l'amour. L'amour de Marzio pour Ofelia,  la jeune femme de son père auprès de laquelle il a grandi et dont il est fou amoureux depuis toujours. Cet amour est impossible, mais Marzio a une autre passion la musique, il va s'y plonger corps et âme. Pour Marzio, la musique comme la vie est un combat, un combat contre les autres, un combat contre la résignation, contre soi même, contre les autres qui eux aussi luttent pour obtenir une parcelle de bonheur. Un bonheur qui semble bien inaccessible aux habitants de San Catello. Philippe Carrese nous plonge dans cette Italie du début du XXème siècle, une Italie divisée, pas encore réunifiée, divisée comme le village lui même. L'Italie paysanne, un monde où il faut lutter pour vivre ou il faut être obstiné pour sortir du lot, même si cette obstination ne peut mener qu'à la tragédie. Philippe Carrese signe ici un très beau roman, émouvant, poignant sur cette fatalité qui frappe l'homme, celle de courir obstinément vers son malheur. Un roman âpre comme la terre lombarde, mais aussi flamboyant, plein d'une faconde toute italienne dans sa description savoureuse et pleine d'un humour grinçant des querelles entre villageois. Une bien belle découverte. Un roman intense.

  "Sur le plateau, Alfredo Visconti, premier violon, fait un geste discret. Toute la troupe se met en branle. Rite immuable : le hautbois lance sa plainte. C'est la curée, l'interminable minute de l'accord, la chasse à la note juste. Tous les timbres convergent vers ce la glacé et rectiligne, avant que les cuivres ne viennent parader avec leur si bémol claironnant. Les corridas ont leurs fanfares qui annoncent, joyeuses, le carnage à venir. Les philharmoniques ont elles aussi leur prodrome rituel : l'accord. Une fois l'eurythmie de l'orchestre réglée, l'hallali pourra commencer : la meute sera parée. Marzio observe les violonistes sur le devant de scène. Une fois de plus, l'ennemi le plus redoutable sera dans ses rangs : celui dont il devra se méfier se tiendra pile derrière lui. "