vendredi 3 avril 2015

On a tué tous les Indiens



On a tué tous les Indiens de Jules Gassot aux éditions Robert Laffont




  Benjamin Chambertin est à l'aube de ses trente ans. A l'heure des premiers bilans autant dire que la situation n'est pas reluisante. Ce passionné de cinéma qui se voyait réalisateur doit se contenter d'un poste d'administrateur de production, son rôle se borne à établir les fiches de paie et à gérer les notes de frais. Mais surtout, Julie, son amour depuis sept ans vient de le quitter. Toute rupture est un deuil et Benjamin va s'y heurter de plein fouet.

   "C'est quoi une rupture? Deux êtres qui se disent au revoir en sachant qu'ils ne se reverront jamais. Deux enfants qui font la guerre, pas dans le même camp. Deux joueurs avec les mauvaises cartes qui ne veulent pas perdre. Une rupture c'est un truc dégueulasse qui arrive par surprise. C'est le gouffre  où l'on sombre comme lorsqu'on est amoureux. Une rupture c'est la mort qui change de nom parce qu'on est toujours vivant."

  Nous allons suivre Benjamin dans dans les différentes étapes de son deuil. Si le deuil comporte sept étapes : le choc, le déni, la colère et le marchandage, la tristesse, la résignation, l'acceptation et la reconstruction, ce sont surtout  la colère et la tristesse qui suintent des pages de ce livre. La colère contre Julie qui l'a quitté et contre la société de consommation qui transforme l'amour en produit. Un produit que l'on consomme et que l'on jette dès qu'il ne fonctionne plus comme on le voudrait, qu'on remplace par une autre histoire sans chercher à le réparer. Une colère et une tristesse qui vont prendre la forme d'une fuite en avant pour Benjamin. Un lent suicide à coup d'alcool, de tabac et de drogue.

   "Je cherche le bien dans l'horreur de la nuit. Laisse moi me perdre dans ta tête, je veux pénétrer les méandres de ton cerveau, je suis le venin qui te fera mal, tu vas adorer, je veux te défoncer et moi avec. Paris la nuit, tous les coups sont permis. Mélange de sexe et de sang, intraveineuses de liberté, tout ça pour quoi? Ne plus sentir son corps, ne plus avoir de limites, s'éclater le crâne contre les murs, aller aux enfers avec de parfaites inconnues pour voir si la Terre est ronde. La vie est une maladie que je soigne au whisky."

   Un énième roman sur la rupture me direz-vous. Oui le thème est éculé mais il est traité avec force et de manière originale. De courts chapitres de deux ou trois pages dont le titre fait référence à un western. On retrouve ici la passion de l'auteur pour le cinéma. Mais pourquoi cette référence au western en titre de chaque chapitre? Le western montre la vie et l'amour tels qu'ils sont, une lutte où les plus faibles sont décimés. Avec ce premier roman très réussi Jules Gassot a su me toucher par la sincérité, la fougue, la verve de sa plume à fleur de peau, une plume très prometteuse. J'attends la suite avec impatience.

   "Pourquoi sommes nous là? La philosophie, la religion, qui de l'autre a enfanté la suivante? À force de chercher, de ne rien trouver, l'homme s'est inventé ses propres mythes, ses croyances exubérantes, et pour finir toutes ses appréhensions ont accouché de leur missel : la carte bleue. Nous sommes ici pour l'utiliser. Un nouvel être, une nouvelle carte. À chaque étape, une carte supplémentaire. En accumuler un maximum c'est la garantie d'aller au paradis. Pour l'enterrement on présente la facture, les crédits à payer, les emprunts tout propres pour recouvrir la bassesse de notre condition."


2 commentaires:

  1. m'a l'air pas mal ...je note ;)

    RépondreSupprimer
  2. Je vais arrêter de te le lire hein! Mouhahahaha. Je me rends compte de plus en plus que nous avons les mêmes goûts et que ma bibliothèque s'agrandit vachement grâce à toi :)

    RépondreSupprimer