Mensonges et faux-semblants de Martine Magnin chez Estelas
Editions
C’est
le moment où mes parts d’ombre et leur nuisance lâchent prise pour accueillir
le réconfort d’une paix fragile.
C’est
le moment où les fantômes sont contraints d’affronter la lumière du jour.
C’est
aussi celui où les bons génies doivent être enfin remerciés. »
Martine Magnin revient dans cet ouvrage sur son enfance. Une
enfance basée sur le mensonge et les faux semblants. Pour prendre un peu de
recul par rapport à son histoire, pour nous révéler les faits de manière plus
froide, elle donne à son personnage le nom de Jenny.
La mère de Jenny est très jeune, trop jeune quand elle vient au
monde. Son père saxophoniste de renom est sans arrêt sur les routes en tournée.
Très vite les choses se dégradent dans le couple parental qui se sépare. La
grand-mère de Jenny, Macha, vient s’installer avec sa fille et sa petite fille.
Les deux femmes s’entendent pour nier le père. On en parle pas. L’enfance de
Jenny se passe entre ces deux femmes, bercées par les contes de sa grand-mère.
Tout se passe relativement bien jusqu’à l’arrivée d’un homme à la maison.
M, c’est ainsi qu’il est nommé s’installe donc à la maison et
Macha retourne chez elle. Sous des faux airs de substitut paternel idéal,
l’homme se livre à des attouchements sur Jenny. M représente le mâle dans tout
ce qu’il a de plus vil, le mal. Jenny étouffe moralement et physiquement. Elle
est sujette à de nombreuses crises d’asthme. La solution est toute trouvée on
envoie Jenny à la campagne dans des familles d’accueil. Jenny connait des
périodes de répit mais elle se sent seule. Chaque fois qu’elle rentre au foyer,
M reprend ses attouchements. Jenny est envoyée dans une famille qui pour une
fois l’aime. Jenny parle, dit la vérité. Le couple prend les choses en main et
dénonce le beau-père prédateur. De retour à la maison, le petite fille subit de
violents reproches de la part de sa mère et de sa grand- mère.
La mère : « Si nous
sommes à nouveau seules, ce sera de ta faute », lui disaient ses yeux.
« Nous
sommes Tes victimes »
« Nous
sommes calomniées »
« Tu
es fautive, responsable, tu nous a fait de la peine ».
La grand-mère décrivant la prison : « … derrière ces murs, il y a plein de petites filles enfermées
parce qu’elles ont trop parlé. »
Mensonge et faux-semblants est un livre vérité, un livre
thérapie. Il lève le voile sur un secret trop longtemps gardé, sur une enfance
maltraitée, détruite, par le prédateur et par le déni et la passivité coupable
de la mère et de la grand-mère. Il le fait sans pathos et parfois avec humour
ce qui renforce l’émotion ressentie à la lecture du livre. Le fait que l’auteur
alterne les passages où elle utilise le personnage de Jenny pour parler de son
enfance, et le « je » donne de la puissance au texte, entre recul et
implication. Ce livre est aussi un superbe hommage au père nié, au père bafoué,
celui dont on ne parle pas et qui va ressurgir dans la vie de Jenny. Un livre
poignant et émouvant remarquablement écrit. Un livre qui se termine par cette citation
d’Oscar Wilde : « Les enfants commencent par aimer leurs parents, puis ils
les jugent, parfois ils leur pardonnent ». Une phrase qui résume
superbement ce très beau livre.
merci Denis , tu as bien saisi l'importance de ce livre délicat, dans ce qu'il dénonce , le mensonge social et familial et encourage, le devoir d'ingérence, l'espoir et la transparence. merci encore
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