Souvenirs de lecture 42 :
Sylvie Dazy
Nous avons tous de ces lectures
qui nous ont profondément touchées, qui sont comme des madeleines de
Proust : on se souvient d’où on était quand on les lisait, du temps qu’il
faisait. Il m’a semblé intéressant de savoir quelles lectures avaient marqué
les auteurs que nous lisons et en quoi elles avaient influencé leur désir d’écrire.
Aujourd’hui c’est Sylvie Dazy qui me fait l’honneur de répondre à mes
questions. Je la remercie pour son temps précieux, sa gentillesse et sa
disponibilité.
Quel
livre lu dans votre adolescence vous a le plus touché ?
SD :
Sans conteste Paroles de Prévert. Je sais que ce poète est
parfois contesté mais pour moi il est fondateur. Mon professeur de Lettres nous
avait demandé de le lire et… coup de foudre !
Je me réfugiais dans un café, comme
pour une rencontre secrète avec moi-même, et j'ouvrais le livre. D'ailleurs
cela me fait penser que maintenant j'écris quasi exclusivement dans les cafés.
J'aimais ces poèmes car ils étaient
simples et tendres. Il y avait aussi un engagement politique, ce que je
percevais sans doute confusément, un regard sur les êtres humains qui me
bouleversait. De la révolte. Ils coulaient clairement en moi.
Plus tard je l'ai fait étudier à mes
élèves, en leur racontant tout cela. Quand je suis partie d'un collège un jour,
une classe de troisième m'a offert le livre, avec toutes leurs signatures. Un
des plus beaux cadeaux jamais reçus.
En
quoi ce livre a t-il eu une influence sur votre désir d'écrire ?
SD :
Il a eu une influence sur beaucoup de choses. Adolescente
malheureuse, j'y ai trouvé un réconfort, une lumière. Presque de l’affection.
Et puis ces mots sont simples, mais à
la fois écrire comme lui est difficile…
Alors j'ai pris un stylo et j'ai
commencé. J'ai longtemps écrit des poèmes « à sa manière », puis des
nouvelles, puis des romans. On peut dire qu'il m'a autorisée.
Je suis allée dans le Cotentin dans son
jardin et sur sa tombe. 40 ans plus tard, même si je ne le lis plus, il reste
un proche.
Quelles
sont vos dernières lectures coup de coeur ?
SD :
Eh bien on va rester dans les récits de formation : Une
Activité Respectable, de Julia Kerninon. Celle-ci nous raconte son entrée en
littérature, avec des parents amoureux des livres, et une mère qui lui offre
une machine à écrire à 5 ans. Elle dit combien il est difficile de se sentir
aspirée vers cette « activité » sans pouvoir rien justifier,
peut-être même en restant à sa porte, et pourtant incapable d'autre chose. Avec
une magnifique écriture, luxuriante, presque violente. (éditions du Rouergue).
Je lis en ce moment : Voici venir les rêveurs de Imbolo Mbue (éd. Belfond). Il s'agit d'un roman sur un sujet contemporain, la vie en occident, à New York précisément, pour un couple de sans papiers. Le rêve qui passe et auquel on s'accroche, certain que cette volonté fera plier la réalité. Las…
Bref, deux romans écrits par des
femmes, c'est un hasard mais ça me fait plaisir de m'en rendre compte.
Biographie
Du Creusot, la ville
ancienne des mines et de la métallurgie, Sylvie Dazy s'envole très tôt pour
migrer vers Lannion et le Trégor. De cette enfance tournée vers le large naît
un amour inconditionnel pour la Bretagne. Mais la vie a plus d'un tour dans son
sac et l'envoie, à vingt-deux ans, aux prisons de Fleury-Mérogis et de la
Santé. Elle devient éducatrice, chargée de réinsertion et dit y avoir tout
appris des relations humaines.
La
quarantaine arrivant, elle fatigue de toujours commencer sa journée en frappant
à la porte d'une maison d'arrêt, elle décide d'écrire, de frapper à la porte de
maisons d'éditions et livre ce texte, inspiré de son expérience. (source www.decitre.fr)
Retrouvez
ici, le lien vers ma chronique du roman de Sylvie Dazy, Métamorphose d’un crabe :
Encore un
grand merci à Sylvie Dazy pour sa gentillesse et sa disponibilité. Je vous
invite à découvrir sa plume dans Métamorphose d’un crabe, son excellent roman.
très intéressant, merci, le hibou
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