vendredi 31 janvier 2014

Nymphéas noirs




Nymphéas noirs de Michel Bussi aux éditions Pocket


   Giverny en Normandie, ville du peintre impressionniste Monet. Une vieille dame, la narratrice observe le village du haut de la tour de son moulin. Elle observe plus particulièrement une jeune fille de onze ans et une jeune femme, l'institutrice du village.


   Ces trois femmes ont un point commun, elles étouffent à Giverny, elles veulent quitter ce paradis des peintres marqué par la présence tutélaire du fantôme du célèbre impressionniste.


   Un jour, un cadavre est découvert à Giverny. Un notable du village, Jérôme Morval, a été tué. Il a été poignardé, on lui a fracassé le crâne et mis la tête dans le ruisseau. L'inspecteur Laurenç Sérénac fraîchement muté de son sud ouest natal et son adjoint Sylvio Benavidès sont chargés de l 'enquête. On découvre dans les poches du cadavre une carte d'anniversaire pour un enfant de onze ans, ornée des nymphéas chers à Monet et sur laquelle on a recopié une strophe d'un poème d'Aragon.


   Très vite l'enquête s'oriente vers trois pistes. La jalousie, Morval était un coureur de jupons notoire, la peinture, il était un collectionneur qui voulait acquérir à tout pris un Nymphéas de Monet, et les enfants de onze ans suite à la découverte de la carte d'anniversaire.


   Durant l'enquête observée du haut de sa tour ou en se promenant dans  le village par la vieille propriétaire du moulin, nous faisons connaissance avec Stéphanie Dupain institutrice passionnée par la peinture, mariée à un agent immobilier d'une jalousie maladive qu'elle n'aime plus et Fanette, jeune fille de onze ans courtisée par les garçons de sa classe. Peintre en herbe de talent, elle souhaite profiter d'un concours de peinture proposé par une association américaine pour  quitter la prison dorée qu'est pour elle Giverny.


  Michel Bussi nous propose un roman qui se lit d'une traite  où il s'ingénie à brouiller les pistes jusqu'à une dénouement final qui m'a complètement bluffé. Ce roman policier aux accents poétiques est un petit bijou ou pour rester dans la thématique du roman, un tableau impressionniste qui distille la vérité par petites touches.

jeudi 23 janvier 2014

Muette



Muette de Eric Pessan aux éditions Albin Michel


   Muette est une adolescente qui décide de fuguer, de quitter sa famille. Elle est fille unique, et muette pas physiologiquement, elle est muette car ses parents ne l'écoutent pas, ne la laissent pas parler, la traitent de menteuse.

   "Infans, qui ne parle pas, dont la parole ne compte pas, dont la parole a moins d'importance que le souffle du vent qui finit par déliter les nuages tout la-haut. Infans, qui nous casse les oreilles avec ses bêtises, qui ne sait rien dire d'autre que des fadaises, des inepties, 
tu me fatigues.
On apprend la vie en comprenant soudain la véritable étymologie des mots. L'enfant doit la fermer..."


   Ignorée, rabrouée par ses parents pour qui en plus de mentir et de faire des histoires elle coûte cher, Muette prépare ses affaires et quitte la maison pour se réfugier dans une grange à une heure de marche de la maison. Elle se retrouve seule, en proie aux peurs  créées par son "éducation". Elle doit se débrouiller pour se cacher et pour survivre.


    Dans ce roman l'auteur vit la fugue de Muette, il est Muette, tous les questionnements de la jeune fille, ses doutes, mais aussi sa détermination à ne pas céder sont rendus de manière bouleversante. Un récit rythmé par les reproches de ses parents scandés tout au long du roman et rendant encore plus émouvante la description de la fugue de cette jeune fille. Une fugue qui est une question de survie. Un roman coup de coeur!

mercredi 22 janvier 2014

Mer agitée à très agitée




Mer agitée à très agitée de Sophie Brassignac aux éditions JC Lattès


   Après des années très "jet set" à New York, Maryline ex top model et son mari rocker renommé, décident de quitter ce monde de paillettes et de dangers. Leur destination : la Bretagne natale de Maryline, le couple et leur fille vont se mettre au vert dans la maison familiale. Environnement idéal pour sauver William de la tentation de la drogue et pour élever sa fille, adolescente au caractère bien trempé.


   La maison, Ker Annette est transformée en maison d'hôte. L'établissement affiche complet l'été. Un beau jour, sur la plage en contrebas de la maison, le cadavre d'une jeune fille est découvert. William, de sortie la veille au soir ne se souvient pas du tout de sa soirée. Il l'a passée comme d'habitude avec ses fidèles amis, un garçon paumé admirateur du rocker et un antiquaire inquiétant. En interrogeant les amis de son mari, Maryline apprend que la jeune fille retrouvée morte avait été en contact avec les trois hommes dans la soirée.


   L'inspecteur chargé de l'enquête n'est autre que Simon, ami d'enfance et ex amant de Maryline. Tout en essayant de disculper son mari, Maryline va petit à petit renouer contact avec son ex. Maryline est perturbée par la situation, elle va devoir faire un choix entre un mari qu'elle protège et pour qui elle ressent une certaine tendresse mais qu'elle n'est plus sûre d'aimer et le policier dont le charme ne la laisse pas insensible mais qui a aussi un côté sombre.


   Les questionnements de l'héroïne sont très bien rendu dans ce roman dans lesquels on passe de l'affaire policière à l'affaire de coeur, de l'émotion à l'humour. Les personnages sont hauts en couleurs et attachants. Une réussite!

66 pages




66 pages de Eric Neyrinck aux éditions Zeugme Editions




   Eric est déprimé, sur les conseils de ses conquêtes féminines et constatant l'efficacité des médicaments se décide à entamer une thérapie.Peu convaincu par l'efficacité d'une telle démarche, il se rend chez une psychiatre cinquantenaire recommandée par son médecin.


   Après la première séance, contrairement à toute attente, Eric se sent mieux et attend avec impatience le prochaine séance. Pour combattre ces démons la psychiatre lui conseille d'écrire. Cet exercice, Eric le vie comme une révélation.


  Novella noire pleine d'émotions ou l'on voit le pouvoir curatif de l'écriture, de l'usage des mots pour soigner les maux. Un texte passionnant au style percutant qui se lit d'une traite.


mardi 21 janvier 2014

L'homme qui a vu l'homme



L'homme qui a vu l'homme de Marin Ledun aux éditions Ombres Noires


   2009 au Pays Basque Jokin Sasco a disparu, après quelques jours, sa famille organise une conférence de presse. Un peu plus tard, l'ETA reconnaît de Joakin est l'un de ses membres. Deux journalistes, Marko Elizabe vont et Iban Urtiz vont enquêter en parallèle sur cette disparition qui pose beaucoup de questions. Marko est un vieux brisquard  rompu à ce genre d'événements dans la région . Iban, lui basque par son père vient de rentrer au pays et découvre un pays basque marqué par la lutte entre ETA, séparatiste et les Etats français et espagnol.


   Iban va découvrit grâce à la soeur du disparu, Eztia ce que tout le monde sait au pays basque mais dont on ne parle pas aux informations, les moyens utilisés par les gouvernements concernés pour lutter contre le séparatisme basque. Très vite Iban va découvrir "l'incommunication" période de cinq jours ou des membres présumés d'organisations séparatistes sont enlevés par les polices des deux pays afin de procéder à des interrogatoires "musclés" avec l'aide d'anciens criminels recrutés pour l'occasion.


   Dans ce roman c'est bien un terrorisme d'Etat que Marin Ledun décrit. La collusion entre Etat et milices privés recrutées parmi d'anciens militaires ou condamnés, tout cela protégé par le silence complice d'une presse qui sait mais ne dit rien. Un roman coup de poing qui résonne des cris des personnes suspectées de terrorisme (mais pas forcément coupables) et de leurs familles. Un roman choc passionnant.

" Dépité, il se remémore l'histoire d'Eléa et ses propos sur la politique répressive et vengeresse de la France et de l'Espagne. Qu'est ce que cherchent ceux qui enlèvent et qui torturent. Que la jeunesse cède au désespoir? Qu'elle entre dans un long cycle de résistance comme ses aînés des décennies plus tôt? Qu'ont ils à y gagner? Les Basques n'ont pas de pétrole..."

Le roi n'a pas sommeil



Le roi n'a pas sommeil de Cécile Coulon aux éditions Viviane Hamy


    Dans un village de l'Amérique profonde, les Hogan sont une famille respectée. William, en revendant la collection d'armes de son père s'est offert une vaste propriété qu'il passe son temps à entretenir. N'ayant plus un sou devant lui après l'achat de la propriété, il travaille  la semaine dans une scierie et le week-end comme agent administratif au poste de police. Hogan a pourtant un côté sombre, il est violent avec sa femme et il boit.


   
Les Hogan ont un fils Thomas, un garçon calme travaillant bien à l'école. Il refuse de céder à la tentation d'une vie facile à la limite de la délinquance proposée par son seul ami Paul. A la mort de son père tout en continuant l'école, il aide sa mère à entretenir la propriété. Thomas grandit et un entrepreneur lui propose de racheter une parcelle de la propriété tout en lui laissant la possibilité de l'exploiter. L'affaire est rentable. Donna, l'aide du docteur O'brien, ami de la famille semble très attirée par Thomas. Thomas semble tout avoir pour être heureux mais les vieux démons qui ont hanté son père le font vaciller.


   Le roi n'a pas sommeil est un roman âpre qui traite de la transmission des "démons" et de l'impossibilité de lutter contre cet atavisme. La psychologie des caractère est décrite avec précision. Le style incisif et sans fioritures donne au récit un rythme soutenu. Un roman noir passionnant dans lequel on suit le personnage évoluer vers sa chute inéluctable. Ce roman fait partie de la sélection pour le prix du meilleur roman des lecteurs des éditions Points.

dimanche 19 janvier 2014

La tête de l'emploi



La tête de l'emploi de David Foenkinos aux éditions J'ai lu


   Notre héros a la cinquantaine, il s'appelle Bernard, un prénom commun pour un homme banal, un prénom qui ne prédispose pas à l'extraordinaire :

   " Le "Bernard" impose une sorte de familiarité tacite, pour ne pas dire immédiate. On n'a pas peur de taper dans le dos d'un Bernard. Je pourrais me réjouir de porter un prénom qui est une véritable propagande pour se faire des amis. Mais non. Avec le temps, j'ai saisi la dimension sournoise de mon prénom : il contient la possibilité du précipice. Oui j'ai toujours ressenti le compte à rebours de l'échec, dans cette identité qui est la mienne. Il y a des prénoms  qui sont comme la bande-annonce de leur destin. A la limite, Bernard pourrait être un film comique. En tout cas , il était certain  que je n'allais pas révolutionner l'humanité."


   Bernard, le narrateur est conseiller financier dans une banque, il est marié à Nathalie avec qui il a une fille. A 20 ans, Alice a décidé de quitter le nid familial, Bernard et Nathalie se retrouve donc tous les deux et découvrent rapidement qu'ils n'ont plus rien à se dire.


   Au boulot les choses ne vont pas beaucoup mieux. Bernard est convoqué par don directeur qui lui annonce que suite à la crise, il doit licencier une personne au guichet et qu'il devra y travailler quelques heures. Son patron a pensé à lui car il a un physique rassurant, qu'il a la "tête de l'emploi". A partir de là  tout va s'effondre dans la vie de Bernard, sa femme va demander la séparation et il va finir par perdre son emploi.


   David Foenkinos explore avec acuité notre quotidien, il décrit avec bienveillance, lucidité et humour nos petites défaites du quotidien, nos lâchetés,  nos renoncements. La tête de l'emploi est le roman d'une reconstruction après une série d'échecs. Le héros redécouvre ses parents et ses proches, se redécouvre lui-même pour mieux pouvoir rebondir. Un style plein d'humour et de délicatesse toujours aussi savoureux.



samedi 18 janvier 2014

Le soleil à mes pieds





Le soleil à mes pieds de Delphine Bertholon aux éditions JC Lattès


 La grande a 24 ans, elle est secouriste au SAMU, nymphomane, elle collectionne les articles de brocante avec pour motivation principale l'accumulation plutôt que la qualité, elle est despotique, dirige la vie de sa soeur, le petite comme si celle-ci était sa marionnette.


   La petite a deux ans de moins que sa soeur. Elle est effacée, elle fait le ménage sans arrêt, son appartement ressemble à un appartement témoin, elle s'est construit un cube de verre virtuel autour d'elle pour éviter le contact avec le monde extérieur. Elle ne peut pas garder un emploi.


   L'enfance de ces deux soeurs a été marquée par un drame. Elles vivaient seules avec leur mère, une mère aimante qui leur lisait des contes de fées. Un jour celle-ci est morte d'une rupture d'anévrisme. La grande décida de ne rien dire à personne et de rester en permanence avec leur mère. Les deux filles furent découvertes après huit jours, les voisins ayant été alertés par l'odeur du cadavre. Par la suite les deux filles ayant  réagi différemment à ce traumatisme qui forgea leur caractère furent mise en foyer.

 
   Ce roman, est l'histoire d'une renaissance après un traumatisme. On voit le petite s'affranchir petit à petit avec difficulté de sa grande soeur dominatrice, traumatisme après le traumatisme,  jusqu'à la libération finale. On peut regretter un peu le contraste manichéen entre les deux filles, il n'en reste pas moins que ce roman au style incisif est passionnant et se lit d'une traite.


   "Dans la chambre de bonne, tout est net comme du temps où les bonnes vivaient vraiment ici. Propre, lisse, aseptisé - du blanc à se noyer dedans. Le noir  et le vrac, ça reste à l'intérieur, bien gardé par les forteresses du corps, sous le fragile treillis des remparts calcifiés"


   "La Solitude, c'est différent : c'est vivre avec la peur, la culpabilité, l'incertitude, la tristesse, la honte. La Solitude, c'est être plein à l'intérieur de soi, et manquer de tout"





vendredi 17 janvier 2014

L'été des lucioles




L'été des Lucioles de Gilles Paris aux éditions Héloïse d'Ormesson


  Victor, un petit garçon de neuf ans vit avec ses deux mamans et sa soeur Alicia. Ses parents se sont séparés deux ans après sa naissance car son père ne voulait pas grandir. Claire sa mère est libraire à Bourg en Bresse et Pilar sa deuxième maman est une artiste peintre qui a du fuir l'Argentine quand elle était enfant.


   La petite famille passe ses vacances à Roquebrune au Cap  Martin ou le père de Victor, François a hérité un appartement de sa soeur décédée. François refuse d'y retourner mais la famille y passe toutes ses vacances. Victor y fait la connaissance de Gaspard, son meilleur ami et de Justine dont il tombe amoureux.


   Les aventures commencent lorsque Victor fait la connaissance de Tom et Nathan, des jumeaux. Avec eux, les trois amis vont arpenter le sentier des douaniers et explorer les villas dont les jumeaux possèdent les clés.

   La rencontre avec Hedwige, une baronne venant depuis longtemps à la résidence va permettre à Victor de répondre à certaines questions qu'i se pose sur sa famille paternel et de mettre à jour un secret qui explique bien des choses.


   L'été des lucioles, est une vague de chaleur en plein hiver. Un roman qui nous parle avec poésie de la magie de l'enfance. Certains adultes comme François, ne veulent pas quitter cette période d'insouciance, d'autre comme Pilar veulent retrouver le bonheur de leur enfance perdue et Alicia en bonne adolescente veut fou faire pour la quitter.  Un roman plein de poésie et de magie on parcourt avec Simon et ses amis le sentier des douaniers et on retourne en enfance. Et pour les habitués d'une certaine librairie de Bourg en Bresse, on retrouve avec plaisir certains traits de notre libraire préférée.
Un très beau roman!!!

mardi 14 janvier 2014

Le potentiel érotique de ma femme



Le potentiel érotique de ma femme de David Foenkinos aux éditions Gallimard



  Hector, jeune homme renfermé, est né vingt ans après son frère. Il travaille avec celui-ci et est apprécié de ses collègues. Bon fils il se sent obligé d'aller régulièrement la soupe maternelle chez ses parents. Hector ne vit vraiment que pour une chose, la collection. Dans son histoire de collectionneur, Hector a eu pour passion divers objets, les badges de campagne électorale, les dictons croates....


  N'en pouvant plus de cette collectionite aigüe, il tente de se suicider mais échoue! Il est hospitalisé six mois. En sortant de l'hôpital il s'invente un séjour aux Etats Unis pour expliquer son absence à ses parents, ses collègues. En faisant des recherches pour étayer son alibi, il tombe amoureux de Brigitte, elle aussi mythomane à ses heures, ils vont d'ailleurs créer ensemble une agence de voyages pour mythomanes où tout sera organisé pour permettre aux clients de s'inventer des souvenirs de beaux voyages.


   Débarrassé de son addiction collectionneuse, Hector vit heureux avec sa femme jusqu'au jour où sa femme entreprend de laver les vitres. C'est le choc, Hector est subjugué par l'érotisme dégagé par sa femme lorsqu'elle lave les vitres. Hector est torturé car il vient de replonger dans l'addiction à la collection, il collectionne désormais les moments où sa femme lave les vitres.


   David Foenkinos nous livre un roman hilarant, porté par des personnages aussi déjantés les uns que les autres (le collectionneur fou, la championne de ping pong nymphomane). Un petit bijou d'humour et quelle plume!

dimanche 12 janvier 2014

Au pays des kangourous



Au pays des kangourous de Gilles Paris aux éditions Don Quichotte


Simon est un petit garçon vif et plein d'imagination. Son père est écrivain, il écrit des livres pour des célébrités, sa mère, elle, travaille pour Danone en Australie et est très peu présente physiquement dans la vie de son fils. Simon ne se sent pas aimé par sa mère, du moins pas comme par son père.  Sa présence lui manque, mais elle est trop occupée "au pays des kangourous". Un jour, Simon retrouve son père dans le lave vaisselle. Très vite, la grand-mère paternelle de Simon, Lola, fait intervenir le médecin qui le fait placer dans une maison de repos.


 Simon, vit désormais chez Lola, une grand-mère haute en couleur entourées par ses amis "les sorcières" qui occupent leurs soirées à danser ou à contacter les esprits dans des séances de spiritisme.  Bien que son mari soit malade, Carole, ne rentre toujours pas d'Australie. A travers les yeux de Simon on assiste à l'évolution de la maladie de son père qui s'aggrave. Bientôt le père est conduit à Sainte Anne chez les "dingues". Lors des ses visites à son père  il rencontre une petite fille, Lily qui semble tout connaître de ce milieu et connaître les malades; Elle va l'aider à mettre des mots sur les maux de son père :

"Lily, dis moi, c'est quoi une dépression? je demande en m'essuyant mes moustaches de lait.
-C'est un peu comme si quelqu'un entrait en toi et te faisait faire des chose dont tu n'as pas l'habitude.
-On dirait un film d'horreur, ce que tu dis.
-C'est pire, ce n'est pas pareil. Tu te réveilles et tu n'es plus comme avant . Celui qui es en toi saute par la fenêtre , ou avale trop de médicaments, et tu ne peux rien faire pour l'en empêcher."


Après Autobiographie d'une courgette, Gille Paris explore le thème de la dépression d'un père vue  par son fils de neuf ans. Un roman émouvant et plein d'humour. On vit la dépression avec le petit Simon. On est attendri par cette relation privilégiée entre le père et son fils. Le fait que Simon soit le narrateur du roman donne encore plus de force à l'émotion. Un roman doux comme une fraise Tagada, acidulé comme un crocodile Haribo, pétillant comme une gorgée de Coca. Un vrai régal.

samedi 11 janvier 2014

La mort du roi Tsongor




La mort du roi Tsongor de Laurent Gaudé aux éditions Actes Sud


   Ambiance de noces au royaume de Massaba (quelque part en Afrique), le roi Tsongor va donner son unique fille , Samilia, en mariage au Prince Kouame. Alors que le roi attend le prince et sa suite, c'est une vieille connaissance qui fait son entrée à Massaba. Sango Kerim qui a été élevé avec les enfants de Tsongor. Celui-ci est revenu de sa quête de fortune et de pouvoir pour rappeler à Samilia sa promesse. Quand ils étaient enfants, ils s'étaient promis l'un à l'autre.Un dilemme se pose à Tsongor , doit il respecter sa parole donnée au prince Kouame ou doit il favoriser la promesse de sa file à Sango qu'il considère comme un fils.


   Parallèlement, nous faisons connaissance avec Katabolonga, porteur du tabouret d'or du roi, ami et conseiller. Les deux hommes se sont connus il y a longtemps alors que le roi Tsongor passait son temps à guerroyer pour étendre son empire. Katabolonga appartenait à l'une des tribus vaincues par Tsongor. Dernier survivant de la tribu des Rampants, Katabolonga se présenta à son vainqueur en lui disant que sa mort lui appartenait et en lui promettant de le tuer. Impressionné par le courage de cet homme, Tsongor décida de l'employer et une belle amitié naquit entre les deux hommes.


  Refusant de trancher entre les deux prétendants de sa fille, Tsongor, las, rappelle à Katabolonga sa promesse. Le conseiller du roi refuse de mettre fin aux jours de son ami. Tsongor se tranche alors les veines des poignets et demande à son ami de lui épargner une mort lente et douloureuse. Katabolonga n'a plus le choix. A la mort de roi, les deux tribus, celle de Kouame et de Sango se lancent dans une guerre sans merci qui durera des années et n'aura pas de vainqueur.


  Le soir avant de se donner la mort Tsongor avait convoqué son fils cadet, Souba pour lui donner une mission. Une fois son père mort, celui-ci devait parcourir l'empire et construire sept tombeaux reflétant les différents aspects de la personnalité de son père. Tsongor ne trouverait le repos qu'une fois placé dans le tombeau choisi par son fils parmi les sept.


   Encore une fois Laurent Gaudé nous offre un roman plein de souffle, rappelant les tragédies antique. Un roman ou la transmission aux enfants, l'amour, et le respect de la volonté paternelle s'opposent à la haine, à la fierté , à l'ambition personnelle, à la bêtise humaine qui conduisent l'homme à sa perte. Tout cela exprimé dans un style flamboyant et poétique.

jeudi 9 janvier 2014

Les coiffes rouges




Les coiffes rouges de Daniel Cario aux éditions Presses de la Cité  collection Terres de France


   Douarnenez dans les années 20, l'auteur nous raconte la vie dans les conserveries de sardine et la révolte de ses ouvrières à travers l'histoire de plusieurs personnages dont certains sont réels et d'autres fictifs.

   La jeune Dolorès Marques, fille d'un marin espagnol installé à Douarnenez et d'une bretonne, débute à la conserverie Guéret. Elle découvre un travail répétitif et dur sous les yeux sévères de la Murène, Muriel Sizun la contremaîtresse qui lui demande de passer la voir à son bureau après le travail. Elle lui demande de se méfier de ses collègues paresseuses et influencées par les idées communistes en vogue à l'époque, Douarnenez vient d'élire le premier maire de France, et d'espionner  pour elle.

 "Les ouvrières n'avaient aucun moyen de se défendre, puisque la législation du travail accordait aux patrons des conserveries alimentaires la dérogation de faire travailler jusqu'à quarante-huit heures d'affilée"


   Dans un premier temps victime de la méfiance de ses collègues qui voient en elle un agent de la Murène, celles-ci se rendent vite compte que la jeune rouquine est de leur côté. En effet la jeune fille répond de manière de plus en plus insolente à la contremaîtresse. Celle-ci, fâchée par le comportement de Dolorès et attirée par elle la fait espionner et menace de révéler à ses parents sa relation avec le mousse de son père, plus jeune qu'elle. Dolorès finit par tuer accidentellement la Murène.

   Repérée par son patron, très sensible à ses charmes, celui-ci, après l'accident de son père qui le conduit à être amputé d'un bras et sombrer dans l'alcoolisme, lui propose le poste de gouvernante dans sa maison "le château" qu'elle finit par accepter après deux refus. Ce poste se transforme en une charge de dame de compagne. Rejetée par ses collègues qui voient en elle une vendue, Dolorès est rongée par le  remords. A la conserverie, l'atmosphère est de plus en plus explosives jusqu'au grève de 1924.


  Un roman bien écrit même si les personnages sont souvent caricaturaux, on retrouve les thèmes chers à Zola , l'ambiance de Ces Messieurs de Saint Malo de Simiot ou des romans de Hervé Jaouen. Intéressant malgré le côté manichéen du livre qui le rend un peu simpliste.

Sardinières dans les année 20


mardi 7 janvier 2014

Les oreilles de Buster




Les oreilles de Buster de Maria Ernestam aux éditions Gaïa


   Lors de son anniversaire,  Eva reçoit de sa petite fille un journal intime. Un cadeau qui arrive à point nommé à l'heure de bilan.


    Dès les premières lignes de ce journal on apprend qu'Eva a tué sa mère. Jusqu'à la fin on assiste à la préparation de ce meurtre libérateur synonyme de renaissance pour la petite fille en quête d'amour maternel qui deviendra une jeune fille meurtrière.


   Dans son journal Eva revient sur sa vie avec sa mère marquée par les constantes rebuffades dont elle est victimes de la part de celle-ci. Eva ne satisfait jamais sa mère, à ses yeux elle n'est pas normale, pas assez belle, ignorante. Tous les  moyens sont bons pour la rabaisser, pour lui enlever les moindres moments de joie qu'elle peut avoir. Sa baby sitter, Britta  avec qui elle avait une relation privilégiée, renvoyée par une mère jalouse, un cadeau de Noël offert de bon coeur méprisé. Eva comprend que pour pouvoir vivre elle va devoir se débarrasser de ce poison qu'est sa mère.


  Au fil des années le plan se met en place, une lenteur dans le passage à l'action qui donne à la mère l'occasion de se racheter mais en vain. Pour se préparer à ce meurtre Eva se lance d'abord dans de petites  vengeances, contre une professeure indélicate, et surtout contre un chien méchant Buster qu'elle tue et dont elle coupe les oreilles. Ses oreilles qui enfermées dans un sac de tissu deviendront ses confidentes.


   Les oreilles de Buster est un superbe roman qu'on ne lâche pas. Le roman de l'amour filial bafoué qui renaît par la vengeance. Comme une seconde chance donnée après la mort à une mère malade et alcoolique aimée sans retour. Un roman bouleversant, passionnant et malgré le thème, plein d'umour. Une réussite!

dimanche 5 janvier 2014

La cuisinière d'Himmler




La cuisinière d'Himmler de Franz-Olivier Giesbert aux éditions Gallimard


   Rose 105 ans, vieille restauratrice marseillaise, reçoit un jour une lettre d'une certaine Renate Froll qui va lui donner l'occasion de revenir sur sa vie en écrivant ses mémoires. Un siècle de vie qui épouse un siècle d'Histoire.


   Rose est née en Arménie en 1907, très jeune elle subit le génocide arménien et est obligée de fuir son pays. Elle trouve un jour une salamandre qui deviendra sa confidente et sa conscience. Elle est capturée et mise dans le harem de Selim Bey qui la traitera bien même si elle devient son esclave sexuelle. Donnée par Selim Bey à un de ses amis patron de cargo, elle profitera d'une escale à Marseille pour s'échapper. Après avoir vécu dans la mendicité elle est finalement adoptée par une famille de paysans des Alpes de Haute Provence, qu'elle y rencontrera son mari .


   Installée à Paris, le couple vit grâce à un Oncle de son mari en faisant des recherches sur un livre que celui-ci veut écrire sur un auteur anti-sémite. Bien que dégoûtés par ce travail, il s'y résolve le temps de mettre assez de côté pour que Rose puisse ouvrir son restaurant La Petite Provence.


   En suivant l'histoire de Rose, des gens qu'elle va rencontrer et dont elle va vouloir se venger, ce  roman nous permet de traverser un siècle d'histoire de l'humanité, du génocide arménien à la deuxième guerre mondiale en passant par la chine communiste . La vengeance est un moteur pour cette femme à la vitalité exceptionnelle qui fait penser par moment à Calamity Jane. Un roman passionnant plein d'humour et de truculence qui nous montre que l'homme est l'animal le plus cruel et que l'histoire ne lui apprend rien.

  "Les humains sont comme les bêtes d'abattoir. Ils vont à leur destin, les yeux baissés, sans jamais regarder devant ni derrière eux. Ils ne savent pas ce qui les attend, ils ne veulent pas savoir, alors que rien ne serait plus facile : l'avenir, c'est un renvoi, un hoquet, une aigreur, parfois le vomi du passé."

samedi 4 janvier 2014

Le club des incorrigibles optimistes



Le club des incorrigibles optimistes de Jean Michel Guenassia aux éditions Albin Michel



   Paris, fin des années 50 début des années 60 c'est le début du rock et de la guerre d'Algérie, Michel un jeune parisien dévoreur de livres, cancre en maths et champion de baby-foot va découvrir dans le café où il retrouvait ses copains pour des matchs endiablés, un club étrange dont au fur et à mesure il va devenir membre.


   Le club des incorrigibles optimistes a été créé par Igor, ancien médecin soviétique réfugié à Paris. Dans ce club on joue aux échecs entre réfugiés politiques originaires des pays de l'Est, on s'organise pour les démarches administratives, on boit, on refait le monde on se dispute entre anciens russes blancs et communistes opposants au régime stalinien.


   Un roman passionnant ou nous sommes les témoins de la jeunesse d'un parisien au début des années 60, les premières amours, l'affrontement avec les parents, la découverte de la musique et de la photo mais aussi la vie des réfugiés politiques à cette époque, une vie en communauté au sein du club sous le patronage de Kessel et de Sartre, et leurs affrontements liés à leur histoire commune avant l'exil.