vendredi 7 août 2015

Souvenirs de lecture 18 : Martine Magnin



Souvenirs de lecture 18 : Martine Magnin



   Nous avons tous de ces lectures qui nous ont profondément touchés, qui sont comme des madeleines de Proust : on se souvient d'où on était quand on les lisait, quel temps il faisait. Il m'a semblé intéressant de savoir quelles lectures avaient marqué les auteurs que nous lisons et en quoi elles avaient influencé leur désir d'écrire. Aujourd'hui, c'est Martine Magnin qui me fait l'honneur de répondre à mes questions. Je la remercie pour son temps précieux, sa gentillesse, sa disponibilité et son humour.


LLH : Quel livre lu dans votre adolescence vous a le plus touché et pourquoi ?


MM :  Avant mon adolescence, il faut que je remonte à mon enfance. Nous sommes dans les années 50, je suis fille, petite-fille, et nièce d'écrivains. Pas de grandes grandes pointures, non , mais tout de même. Disons que tout le monde autour de moi écrivait, à la main , mais aussi sur des machines mécaniques. Le jour, la nuit, tout le temps. Mon grand-père qui vivait en Camargue écrivait des poèmes et des romans policiers, fort appréciés, mon oncle aixois, écrivait lui aussi des romans policiers plus modestes, ma grand-mère, qui avait donc épousé mon grand-père, était la fille du dernier Gouverneur de Madagascar et y avait passé toute sa jeunesse. Elle écrivait des contes et légendes dans la merveilleuse collection Nathan et elle participait aussi au magazine La Semaine de Suzette. Ma mère se lançait dans l'écriture à son tour avec de nombreuses fictions plutôt spirituelles, puis dans un deuxième temps elle a aussi écrit moult Contes et légendes à son tour. Puis le démon de l'Histoire et de la Gastronomie l'a poussée à se consacrer avec un énorme succès  à la rédaction de véritables bibles sur l'Histoire de la Gastronomie et à des dizaines de titres de cet univers. Et elle écrit encore.

          Ceci étant posé, ma vie d'enfant et d'adolescente se passait au milieu des livres. J'avais bien entendu quelques lectures à moi, mai peu. En fait je servais de public et de testeur à tous les écrits familiaux. Mère et grand-mère inventaient avec moi, je participais aussi au délire de leur plume. Je bénéficiais également d'un capital livres  avec une bibliothèque assez unique et hétérogène.



          Grâce à la collection des Contes de Nathan, j'ai parcouru un monde fantastique  sans limite ; je fréquentais les rois, les princesses, les génies, bons ou mauvais, et toutes les superstitions possibles . Je ne sais plus pourquoi, j'avais aussi toute la collection des Bob Morane, comme un garçon. J'ai eu ma période Science Fiction puisque Jimmy Guieu était un ami proche de mes parents et aucune soucoupe volante ou petite homme vert ne me faisait peur. Je mentirais en évoquant un livre plutôt qu'un autre. De la production hors famille, je ne me souviens que de trois livres, Le Petit Prince, Mon amie Flicka (qui a déclenché mon amour pour les chevaux) et surtout Alice aux Pays des Merveilles, qui est toujours dans ma bibliothèque car c'est pour moi LE livre des possibles, des rêves, et de l'ouverture vers l'ailleurs.

         Grande adolescente ou adulte, j'ai fait de vraies rencontres littéraires et ce sont mes parrains.


         Umberto Eco, avec Le Nom de la Rose, je l'ai lu dans sa première édition et j'ai été éblouie de pouvoir partager sans douleur une telle érudition quasi jouissive, un travail romanesque autant qu'historique, un roman à clé, dont l'enjeu est la liberté de penser. Merci à lui.

         Gabriel Garcia Marquez avec Cent ans de solitude que j'ai lu et relu avec un plaisir renouvelé. De mémoire je le cite : " Il régnait une telle humidité, que les poissons entraient par la porte et ressortaient par la fenêtre". Outre le fait qu'il était romancier et militant politique, et qu'il a reçu le prix Nobel, un homme capable d'écrire un telle phrase ne peut qu'être un ami ou un parrain.

          Michel Tournier avec Les Météores, je dois à ce conteur fabuleux un regard tolérant sur la différence, et je l'en remercie.


LLH : En quoi ces livres ont-ils eu une influence sur votre désir d'écrire ?


MM :  Il aurait été étonnant qu'avec une telle famille et de telles rencontres je ne me lance pas à mon tour. Avec modestie.


           J'ai conçu mon premier conte à dix ans, en le dictant à ma grand-mère. Il a fait l'objet d'une diffusion sur Radio France lu par Jean Nohain. Oui, c'est vieux !

           Et je n'ai pas eu l'occasion d'écrire pour moi-même avant la soixantaine.


LLH : Quelles sont vos dernières lectures coups de coeur ?





MM :  Lectures récentes :


            - Zoé, d'Alain Cadéo, car j'avais lu la chronique du Hibou qui m'avait enthousiasmée et je n'ai pas été déçue.

            - Le vieux qui déjeunait seul , de Léa Wiazemski, très émouvant et bien écrit.

            - Le liseur du 6h27, de Jean-Paul Didierlaurent, encore un livre sur les livres, plein d'humour et de talent, que j'aurais bien aimé écrire moi-même.


Biographie


            Toute ma carrière s'est déroulée dans le milieu de la communication, agences du publicité et agences de presse, toute une carrière à écrire pour les autres. Puis une deuxième vie dans les antiquités, l'art de la table , sous le nom "Ma grand-mère avait les mêmes". Aujourd'hui, j'écris, partout où je suis , au gré des mes engagements professionnels ou familiaux, en Provence  (avec délice) et à Paris (avec parcimonie). J'ai eu la chance de voir mes deux premiers écrits publiés sous pseudo il y a cinq ans, discrétion exige, puis deux essais littéraires La Défête des Mères et Le Petit Livre Rouge des Meilleurs Voeux, enfin aujourd'hui mon premier roman Les Larmes des Saules, tous trois chez le même éditeur Estelas. La suite des Larmes des Saules se prépare sous mes paupières.



           Encore un grand merci à Martine Magnin pour sa gentillesse  et sa disponibilité. Le roman de Martine ainsi que les livres cités, traités sur ce blog figures en colorisé et disposent d'un lien intégré vous permettant d'accéder directement à la chronique concernée. 

   

2 commentaires:

  1. je ne peux taire mon émotion, pour cet interview qui m'a fait revenir au sein de ma famille d'écrivains et au creux de ma propre vie, Denis,Hibou, tu as fait un travail formidable , merci à toi ! à bientôt !

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