mardi 25 août 2015

La maladroite



La maladroite dAlexandre Seurat aux éditions La brune du Rouergue (rentrée littéraire 2015






   La petite Diana a disparu. Tous ceux qui l'ont côtoyée savent qu'il est déjà trop tard. Ils témoignent tour à tour du calvaire qu'a été la courte vie de l'enfant.

   La mère de Diana est instable. Elle a déjà eu un garçon d'une première union qui s'est soldée par un échec, depuis elle cherche l'homme avec lequel faire sa vie. Elle le trouve et tombe enceinte de Diana, mais l'homme la laisse tomber. La jeune femme se réfugie chez sa mère et projette d'accoucher sous X avant de revenir sur sa décision pendant la période légale de réflexion. Finalement l'homme vient la rechercher et la petite famille s'installe.

  Dès les premiers jours d'école de Diana, son institutrice a senti un problème. La petite fille présente un certain retard sur les apprentissages et arrive souvent à l'école avec des blessures, des bleus, des bosses, quand elle ne manque pas l'école car elle est malade. Elle convoque les parents, interroge Diana. Les parents présentent l'aspect d'un couple idéal, de parents attentifs et aimants. Les ecchymoses de Diana sont dues à la maladresse causée par son handicap. Quand elle était bébé une plaque de plâtre du plafond lui est tombée dessus. Les observations de l'institutrice l'amènent à se poser la question de la maltraitance. Elle en parle à la directrice. Quand les pressions deviennent un peu trop insistantes, les parents déménagent et changent Diana d'école.

   Dans ce roman qui fait froid dans le dos, Alexandre Seurat nous décrit l'inertie des services sociaux et de la justice dans les cas de maltraitance. Les services concernée passent leur temps à se renvoyer la balle de peur de faire une erreur. Les témoignages successifs des gens qui ont eu affaire à Diana et à ses parents nous plongent dans l'horreur absolue. Entre les personnes impuissantes et celles qui ne veulent pas voir, le martyr de Diana se poursuit.  La construction du roman sous forme de témoignages renforce encore plus le réalisme et l'horreur de l'histoire, la colère que l'on éprouve face à ces services sociaux qui ne se mettent en action qu'une fois qu'il est trop tard.

  La maladroite est un roman terrible, poignant, sûrement l'un des romans les plus durs, les plus marquants de cette rentrée littéraire par son thème. Un premier roman au sujet difficile parfaitement maîtrisé. Un roman qui happe, qui bouleverse qui nous pose des questions, qui suscite le dégoût et la colère, l'impuissance. On se laisse aspirer par cette spirale de l'horreur. Que pouvaient faire de plus ces personnes qui ont côtoyé Diana tant la machine administrative est difficile à bouger ?

  "En quinze jours de classe, j'avais compris, les bleus, les bosses, quand j'y repense j'ai l'impression que tout s'est déroulé à travers un cauchemar. Alors, je ne vois plus ma classe, mes élèves se figent en noir et blanc - et parmi eux, il y a Diana : elle est la seule à ne pas être en noir et blanc et à ne pas être immobile, je la sais en danger, elle me regarde, comme si elle guettait de moi ce que je peux faire, ce que je vais faire. Mais dans le cauchemar, je sais que tout est déjà trop tard pour elle, elle me regarde, et je ne peux rien faire, et je voudrais qu'elle me pardonne. "

"Je valide mon inscription à Focus Littéraire sous le pseudo denisarnoud."

  

3 commentaires:

  1. vraiment, cette critique est déjà bouleversante, et je me sens tout à fait concernée tant par le sujet que par l'écriture, je mets dans ma PAL

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  2. j'avais répondu le 25 Aout que je le mettais dans ma Pal, chose faite, je viens de refermer ce livre et n'envisage pas de pouvoir m'endormir après une lecture aussi violente, coupante, nette, et parfaite. Tout est remarquable dans ce premier livre, la construction, le style, la pudeur, l'écriture, le choix des mots, ... je suis ébahie. bravo à l'auteur que j'aimerais connaître un peu mieux. Chapeau bas. Mais cela étant quelle horreur. Dur de s'en remettre. merci donc à Denis pour cette chronique , le Hibou a l'oeil clair et le cerveau actif.

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