dimanche 4 janvier 2015

Emmaüs




Emmaüs d'Alessando Baricco aux éditions Folio



     Nous sommes en Italie dans les années 70. Quatre garçons de 18 ans inséparables : le narrateur, Bobby, Luca et le Saint. Ils ont la même éducation, les mêmes aspirations. Ils sont issus de familles qui ont des valeurs, des familles religieuses. Ils ont reçu une éducation rigide marquée par les préceptes de la religion catholique et en sont heureux. Ils ne connaissent rien d'autre. Le dimanche, ils jouent en quatuor à la messe, pendant leur temps libre, ils aident à l'hôpital social, changeant les poches urinaires des malades. Dans leur petit monde clos, il n'y a pas de place pour le drame, le drame est affaire de riches.

   "Nous avons des destins mesurés, qui semblent répondre à un mystérieux précepte d'économie domestique. Ainsi exclus du tragique, nous héritons de la bagatelle du drame - en même temps que de l'or pur de l'imagination."

    Enfermés dans leur monde clos, protégés, comme dans un cocon, ils ne sont pas préparés à vivre le drame. Le drame que nous sentons venir dès le début du roman. Ce drame qui va être occasionné par l'irruption du monde extérieure dans leur monde à eux.


   "Dans l'attirail de normalité réglementaire il faut prendre en compte le fait, incontournable, que nous somme catholiques - croyants et catholiques. En réalité, elle est là l'anormalité, l'aberration qui vient renverser le théorème de notre simplicité. On croit, et il ne semble pas y avoir d'autre possibilité . Néanmoins, on croit avec férocité, et avidité, non dans une foi tranquille, mais dans une passion incontrôlée, comme un besoin physique, une nécessité. C'est le germe de quelque folie - l'ombre évidente d'un orage à l'horizon."

    Le drame qui va bouleverser la vie des quatre jeunes gens a la beauté fatale d'une jeune fille Andrea que tout le monde appelle Andre, un prénom masculin bien en accord avec sa personnalité libre. Andre est belle, magnétique. Elle vient d'un autre monde, elle est issue d'une famille riche, de ces familles que nos quatre garçons observent de loin. Des familles qui ont le temps pour le drame, qui ne vivent pas selon les principes de la religion, qui n'ont pas de cadre.

    Andre est une fille libre, perdue, qui passe son temps avec des hommes plus âgés qu'elle dans les cafés, qui se donne entièrement. Nos quatre jeunes sont subjugués par elle, vont tomber amoureux d'elle. Le groupe n'y résiste pas. Elle va remettre en question leur valeurs, tout ce en quoi ils ont toujours cru. Des aspirations communes du groupe, de ce NOUS qui les unissait, il ne subsistera plus rien, on passe au JE des individus.

   Dans ce roman c'est du passage à l'âge adulte dont il est question. Le drame c'est la perte de l'innocence dû au frottement des convictions qui nous ont été inculquées à la vie réelle. Un roman dans lequel j'ai eu beaucoup de mal à rentrer et qui me laisse un sentiment mitigé. J'ai été séduit par la plume de Baricco, mais je n'ai pas été transporté par l'histoire.



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