La mésange et l’ogresse d’Harold
Cobert aux éditions Plon
L’affaire Fourniret, tout le monde en a entendu parler. C’est
ce thème qui s’est imposé à Harold Cobert pour son nouveau roman. Car c’est
bien d’un roman dont il s’agit, mais un roman si documenté et si bien mené qu’il
pourrait être confondu avec un récit, un témoignage.
26 juin 2003. Très énervé par les mauvais résultats
scolaires de son fils Jeff, Michel Fourniret part vendre son bureau d’écolier.
En chemin il repère un joli « sujet », une « membrane sur
pattes » qui pourrait le calmer. Il est obsédé par la
virginité. Les jeunes filles et jeunes femmes qu’il enlève, viole et tue, se doivent
d’être vierges. Les travaux d’approche s’annoncent bien. Il demande son chemin
à Louise Lemaire, la rassurant sur le fait qu’il ne lui veut aucun mal, qu’il
est professeur de dessin et père de famille, la fait monter dans son camion. C’est
alors que le vrai visage du prédateur se révèle. Louise ne se laisse pas faire.
Fourniret est obligé de la ligoter à l’arrière de son camion. Louise parvient à
se défaire des ses liens, et profite d’un ralentissement pour s’échapper. Prise
en charge par une automobiliste qui note la plaque d’immatriculation, elle se rend
directement au poste de police le plus proche. C’est le début de la fin pour
Fourniret.
Avant son arrestation, Fourniret, a juste le temps d’appeler
Monique, sa femme pour lui dire que si on lui pose des questions, elle devra
répondre qu’il était chez Huguette. C’est le début d’une longue introspection
de la part de Monique. Elle revient sur sa relation avec son « Fauve »,
son « Loup », sur ses penchants, son caractère. Elle nous révèle qui
est Fourniret, et qui elle est, elle.
« Quand Fourniret
m’a dit : « Reste planquée avec Jeff, et si on te demande, j’étais
chez Huguette », j’ai su que ça ne c’était pas bien passé, oui, je l’ai su
tout de suite, ça ne peut pas bien se passer sans moi, il le sait, Fourniret,
au fond de lui, il le sait, il a besoin de ses chasses en solitaire, je le
comprends, je le savais depuis le début, sauf qu’après il a besoin de moi, il n’y
arrive pas sinon, il suffit qu’elles lui résistent un peu, qu’elles lui crient
dessus, et il se débine, un enfant pris en faute, même avec son révolver, il
prend ses jambes à son cou… »
L’affaire est confiée à Jacques Debienne, vieux flic en fin
de carrière, rongé par le cholestérol, la sciatique et les hernies. Pour lui c’est
l’affaire d’une vie.
Harold Colbert en atlernant les chapitres de monologue de
Monique Fourniret, les impressions de Jacques Debienne, les procès verbaux d’audition,
et les faits, en remontant aux plus anciens, nous plonge dans l’horreur de ce
couple infernal en se concentrant sur le personnage de la femme.
Mieux qu’un caméléon, comme il l’avait fait avec Jim
Morrison dans Jim, Harold Cobert se glisse, se fond dans le personnage de
Monique Fourniret . Qui est cette femme ? Victime manipulée,
complice, véritable partenaire encourageant les penchants pervers de son mari ?
Est-elle une mésange ou une ogresse ? À vous de vous faire votre idée.
Partir de faits réels pour en faire un roman est un exercice périlleux, surtout
dans ce cas, mais Harold Cobert, déjoue avec talent tous les écueils qui
auraient pu joncher son chemin. La mésange et l’ogresse est un roman
passionnant et glaçant, une plongée dans l’horreur. Bravo l’artiste !