dimanche 7 septembre 2014
Une vie à soi
Une vie à soi de Laurence Tardieu aux éditions Flammarion
L'auteure est perdue dans sa vie, perdue dans son métier par lequel elle vit tant financièrement que moralement. Elle ne parvient plus à écrire. Un après-midi errant sans but dans les rues de Paris, elle rentre au musée du Jeu de Paume où elle a des souvenirs de petite fille avec ses parents. Dans ce musée se tient une exposition des photographies de Diane Arbus, photographe décédée une il y a une quarantaine d'année. C'et LA rencontre. Une rencontre qui n'aurait pu jamais se faire mais qui va changer sa vie. Lui rendre sa vie.
"A quoi ma rencontre avec Diane Arbus a-t-elle tenu? A rien, à la lumière et à la solitude de ce jour d'automne, au souvenir du musée du Jeu de Paume avec mes parents. A rien. J'en ai rétrospectivement le vertige. Car il y a des rencontres qui sauvent, elles vous saisissent au corps, elles vous soulèvent du sol auquel vous êtes englué, elles vous font passer de la nuit à la lumière."
Bouleversée par cette exposition, par l'émotion ressentie à la vue des photos de l'artiste, Laurence Tardieu va faire des recherches sur cette photographe, va devenir obsédée, hantée par cette femme et par les parallèles entre leur deux vies à quarante ans d'écart. En se plongeant dans la vie de Diane Arbus c'est dans sa propre vie que l'auteure s'immerge. Des souvenirs enfouis lui reviennent. Comme Diane Arbus, Laurence Tardieu se construit grâce à l'écriture, apprend à se connaître grâce à l'écriture, cette écriture qui la fuit.
" Les mots s'écrivaient, je les découvrais. C'était celle que j'étais qui commençait à s'écrire, et que je reconnaissais enfin. C'était celle que j'étais qui commençait à exister. J'avançais vers des territoires interdits : ceux situés de l'autre côté des convenances, des masques, des décors parfaits. J'avançais mot après mot vers le vivant."
Cette écriture vitale, nécessaire à son équilibre mental :
"A chaque livre je retrouvais sans le savoir la chambre de mon enfance. Je descendais en moi, j'allais à la rencontre de tout ce que je ne savais pas nommer. Aujourd'hui, je descends encore, je descends, je rencontre ma douleur, ma folie, ma peur, ma violence, ma joie, ma petitesse, ma force, ma précarité, ma difformité, mon enfance, ma vieillesse, mon langage, mon impudeur, mon envie de vivre, mon envie d'en finir, je rencontre celle que je suis en mille morceaux et j'essaie chaque fois de nommer, pour ne pas demeurer engloutie dans mes propres fonds."
Cette rencontre par delà, le temps, par delà l'espace avec Diane Arbus, une rencontre presque physique va rendre à l'auteure ce qui manquait à sa vie, ce qui faisait sa vie : l'écriture.
Une vie à soi est de ces livres dont plus on arrive vers la fin plus on ralentit le rythme de lecture pour ne pas le refermer. Ce livre sur l'écriture et la vie, sur la vie par l'écriture, la vie pour l'écriture, sur ces rapports vitaux, entre l'artiste est son oeuvre m'accompagnera longtemps. Laurence Tardieu votre livre est de ceux vers lesquels on revient pour s'y replonger régulièrement tant ils est riche en vie et en émotions. Un livre au style à fleur de peau bien au delà d'un simple coup de coeur ce qui a rendu cette chronique bien difficile à écrire.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Ça a l'air bien sympa belle chronique
RépondreSupprimeroui çà donne vraiment envie de le lire...
RépondreSupprimerIl est noté depuis un bout de temps, je suis certaine que j'aimerai ! Très belle chronique ! ;)
RépondreSupprimerPréparez vous à un choc , préparez vous à être émue, c'est un livre qui remue des choses enfouies en chacun de nous! Bonne lecture à vous et merci pour votre retour!!
Supprimerjolie chronique, et belle émotion, merci
RépondreSupprimer