L'oeil du prince de Frédérique Deghelt aux éditions J'ai lu

1964, Yann vient de perdre sa femme et le bébé qu'elle portait dans un accident de la route. Il a songé à se suicider mais n'a pas pu. Il quitte New York car tout lui rappelle sa femme. A San Francisco chez une amie, il rencontre Allen qui l'invite chez lui dans une maison au bord d'un fleuve, il va s'y reconstruite pendant quelques mois.
Agnès et Alceste sont résistants. Ils font partie du même réseau mais ne se connaissent pas. Elle approvisionne le groupe dont Aleceste fait partie. Ils communiquent par lettres codées mais peu à peu un ton plus personnel prend le pas sur les informations purement logistiques, ces deux là partagent le même engagement, ils vont très vite partager de doux sentiments dans ces temps marqués par la violence, la haine et la peur.
Benoît, français exilé aux Etats Unis est pianiste de jazz à succès. Il se débat dans une vie de couple qui après vingt ans laisse un goût amer, le goût amer des disputes constantes.
Le lecteur suit ces tranches de vue depuis l'oeil du prince, cette place qui était celle du roi dans un théâtre, d'où on voit le mieux le spectacle. Il est le témoin privilégié de leurs combats, de leurs luttes, de leurs questionnements. Cinq récits qui se rejoignent portés par la plume précise, incisive, parfois féroce, romantique, tendre de Frédérique Deghelt
"Par là grâce d'un saxophone, j'entrais sur la pointe des pieds dans ce monde du contretemps, tellement adapté au contre-pied de la vie que je menais. Moi aussi, en quelque sorte j'avais un statut de nègre, de corbeau sur la neige, de bannie. J'étais punie par des adultes qui me trouvaient insolente, et rejetée par des enfants parce que je pensais différemment et que je n'aimais pas leurs jeux. De toute façon, je n'aimais que les livres, la musique et le cinéma pour me sauver d'une réalité révoltante."
"L'aventure ça se vole, le destin ça se fabrique, l'avenir, il faut l'attraper au lasso et tenir sur la selle du cheval sauvage qu'est la vie non désirée."
" Le deuil est un pays qu'on explore à petits pas. On ne peut vaincre le destin en l'ignorant, en le mettant à distance. On ne meurt pas des coups durs, on meurt quand on oublie qu'ils existent et qu'ils vous frôlent à chaque instant. Éprouver la mort de ceux qu'on aime en négociant avec le deuil, c'est comme courir le cent mètres à quatre mille mètres d'altitude, il faut respirer tout doucement pour ne pas suffoquer, ne pas s'étouffer, s'habituer au souffle de la mort, à la sidération de la vie disparue."
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